chapitre 10
Elise rejette la tête en arrière avec un rire de gorge. Elle est humide de désir, impatiente de jouir. Son amant à la peau mate la pénètre d’un seul coup de rein et elle jouit presque immédiatement.
Alex accueillit Meghan avec un grand sourire et se pencha vers elle pour l’embrasser. Comme elle ne répondit pas tout de suite à son baiser, il recula légèrement, mortifié par son absence de réaction. Mais elle rattrapa ses lèvres et l’embrassa d’une bouche affamée. Tout rentrait dans l’ordre.
Oh, bon sang ! il était accro…
— Nick, c’est vraiment la plus moche de toutes.
Suivant son regard moqueur, il contempla sa chemise couverte de larges motifs rouges, verts et blancs.
— Qu’est-ce que tu racontes ? Elle est superbe. Je la porte tous les ans à Noël.
Elle le prit par le cou et pressa son corps contre le sien.
— Festive ou pas, je vais devoir te l’enlever.
— Ah oui ?
— Oui, murmura-t?elle au creux de son oreille. En n’utilisant que les dents.
Sa bouche brûlante dessinerait un sillon le long de son torse puis s’attaquerait de la même façon à la fermeture Eclair de son jean…
Il la prit par la taille et la maintint serrée contre l’érection qu’elle venait de provoquer.
— Tu vas devoir rester collée à moi jusqu’à ce que je puisse marcher.
— Oh, vraiment ? Mais que pourrions-nous faire pour passer le temps ? demanda-t?elle d’une voix ingénue en frottant son ventre contre son entrejambe.
— Arrête ça, Beauté fatale.
— Pourquoi ?
Il lui mordilla le cou.
— Je vais me faire arrêter pour atteinte aux bonnes mœurs, si tu continues. Tu vas me le payer.
— Hmm… Tout le plaisir est pour moi, répondit-elle, effleurant sa bouche du bout de la langue, avant de reculer avec un grand sourire. C’est toi qui connais la ville. Où allons-nous ?
Les pouces dans les poches de son jean, il réajusta discrètement son caleçon. Puis, se raclant la gorge, il essaya de remettre en marche son cerveau.
— Il y a l’aquarium géant de Key West.
Elle grimaça.
— Tu as promis de m’emmener manger des fruits de mer ce soir. Je ne pourrai rien avaler si on passe l’après-midi à admirer leurs cousins.
— D’accord. Alors, allons chez Mel. C’est plein de trucs de filles, ça devrait te plaire.
— Des trucs de filles ?
— Perles, or, rubis…
— Oh, ce genre de trucs ? s’exclama-t?elle, visiblement ravie.
Une fois dans le musée d’Histoire maritime de Mel Fisher, Alex repéra une affiche qui annonçait la projection d’un documentaire. La séance était sur le point de commencer. La Nuestra Señora de Atocha, un galion du xviie siècle, avait coulé au large des Iles Marquises en 1652. Fisher et son équipage avaient réussi à repêcher l’Atocha et sa précieuse cargaison après de longues années de recherche. Le film durait un quart d’heure.
Alex tira Meghan par le coude.
— Viens, ça va commencer.
— Ça a l’air intéressant.
— Oui, je crois que tu vas apprécier.
Un plan venait de prendre forme dans son esprit. Le moment était venu de payer.
Plus un siège de libre dans la salle. Alex entraîna Meghan au fond au moment où les lumières s’éteignirent et, s’adossant au mur, l’attira contre lui.
— Quoi que je fasse, tu dois garder le silence.
Elle hocha la tête d’un air hésitant. Posant les mains sur ses seins, il les soupesa et commença à les caresser. Meghan, bouche bée, jeta un coup d’œil inquiet autour d’elle, mais il ne s’arrêta pas. Au contraire. Il prit les petites pointes entre ses doigts et les pinça doucement.
Excitée, le souffle court, elle regarda droit devant elle. Le film se déroulait sur l’écran, projetant une lumière clignotante sur son visage. Les yeux mi-clos, elle se laissa aller en arrière contre Alex. Il insinua alors sa main droite dans son short. Elle lâcha un petit soupir.
— Souviens-toi que tu n’as pas le droit de faire le moindre bruit, lui rappela-t?il.
Après quelques secondes, elle se détendit et changea d’appui, les jambes plus écartées. Il glissa les doigts jusqu’à son clitoris et décrivit des cercles lents tout autour avant de plonger dans la fente de son sexe humide et chaud. Les lèvres entrouvertes, elle expira, haletante, et ses muscles intimes tressaillirent autour de ses doigts. Comme il la pénétrait plus profondément, elle se tortilla contre sa main, devançant ses caresses.
Elle était brûlante, mouillée et à sa merci.
Il lui effleura l’oreille de ses lèvres.
— Si tu savais comme je bande, murmura-t?il. Tu le sens ? Je voudrais être en toi, aller et venir, plus fort, plus profond, jusqu’à ce que tu cries de plaisir.
Au bord de l’abîme, elle se mordait les lèvres, le souffle court. Il jeta un coup d’œil à l’écran et, avec un timing parfait, retira sa main juste au moment où apparaissait le générique de fin. Les lumières se rallumèrent.
Meghan cligna des paupières, les yeux écarquillés et le visage en feu. Elle se retourna contre lui et enfouit son visage dans son cou pour se cacher des spectateurs qui défilaient vers la sortie.
— Bon sang ! s’exclama-t?elle à mi-voix, comment as-tu pu me faire un truc pareil ? Pourquoi as-tu arrêté ?
Elle se mit à tambouriner des poings sur sa poitrine.
— Je t’avais dit que tu me le paierais ! répliqua-t?il en lui volant un baiser.
Elle laissa échapper un petit soupir et lui cogna le torse d’un coup de tête.
— Tu es horrible, Nick. Monstrueux.
Il rit, sans riposter. L’érection qui déformait encore la braguette de son jean ne facilitait pas non plus ses mouvements.
— On continue ? proposa-t?il.
— Tu penses avoir gagné, hein ? Mais je n’en ai pas fini avec vous, monsieur. Loin de là.
— Je suis ravi de te l’entendre dire, Beauté fatale.
Ils visitèrent le musée main dans la main. A la boutique, il lui offrit un pendentif rattaché par un cordon en cuir. Il s’agissait d’une petite pièce de monnaie en argent qui avait passé plusieurs centaines d’années au fond de la mer avant d’être repêchée par Fisher.
— Lorsqu’ils l’ont remontée à la surface, c’était un petit morceau de métal informe. Et maintenant, regarde.
— C’est magnifique.
Il le lui attacha autour du cou.
— Il faut beaucoup de patience et de travail pour révéler la vraie valeur des choses, déclara-t?il, le regard brûlant.
— J’ai comme l’impression que l’on ne parle plus de fouilles sous-marines…
— Je ne voudrais pas que tu passes à côté d’un trésor enfoui.
— Je t’entends bien, Nick, mais nous n’avons pas seize ans. Mes vacances se terminent dans quatre jours.
Il prit sa main dans la sienne.
— Ce n’est pas obligé.
— Si. Je n’ai pas l’habitude des histoires d’un soir, mais…
— Comment ça, un soir ? la coupa-t?il en lui lâchant la main. Je croyais que tu m’avais donné le reste de la semaine ?
Elle posa la main sur sa bouche pour l’interrompre.
— Profitons de l’instant présent, O.K. ?
Il hocha la tête en signe d’assentiment. Tout en se promettant de ne pas en rester là. Il voulait qu’elle reconnaisse le lien spécial qui les unissait. Il adorait faire l’amour avec elle, mais il appréciait encore plus les moments partagés, les rires et l’amitié. Elle.
Ils passèrent l’après-midi à visiter Key West, ses rues ensoleillées, ses boutiques hétéroclites et ses musées, avant de retourner vers le ferry.
— J’adore Key West, déclara finalement Meghan avec enthousiasme. Regarde : un magasin de souvenirs à trois sous côtoie un vieux bistrot décrépit et une galerie d’art… Et, partout, on sent l’odeur de la mer.
— Oui, moi aussi j’aime cet endroit. Mais tu n’as pas encore vu le meilleur.
— C’est où ?
— Tu verras ce soir, au moment où le soleil se couche. Je te promets que tu ne le regretteras pas.
Alex avait quitté Meghan deux heures plus tôt dans le hall de l’hôtel, afin de réviser le plan d’investissements que la société de courtage Alexander devait proposer aux représentants du cartel dépêchés en Floride. Emelio et lui avaient rassemblé assez d’informations pour leur soumettre un projet crédible, et ils attendaient maintenant que Frankie Ramos se manifeste. Si son yacht était toujours ancré dans le port de Key West, le trafiquant de drogue n’avait pas encore donné signe de vie.
Alex ne devait pas retrouver Meghan avant le dîner, mais il décida d’aller voir si elle était dans sa chambre. Peut-être était-elle en train de faire la sieste…
Arrivé devant la porte de la suite 608, il hésita un instant avant de frapper. Dans la main gauche, il portait un petit paquet, acheté à la boutique de souvenirs de l’hôtel. Il mourait d’envie de voir Meghan l’essayer.
Le bandeau noué sur mes yeux est d’un érotisme puissant. Le souffle court, j’attends avec impatience — et une pointe d’appréhension ? — que mon amant me touche enfin. Il vient à moi dans l’obscurité, en silence, résolu à me prendre totalement, corps et âme.
Meghan lui ouvrit, vêtue d’un peignoir. Elle recula d’un pas pour le laisser entrer et considéra le petit paquet avec curiosité.
— C’est pour moi ?
Nick lui tendit le paquet. Elle le prit et en sortit une magnifique écharpe de soie vert émeraude.
— J’avais envie d’essayer quelque chose de nouveau avec toi, si ça ne te fait pas peur, murmura-t?il tout en la déshabillant du regard.
Etait-il en train de suggérer ce à quoi elle pensait ? Elle avait décrit dans son journal une ou deux scènes érotiques incluant des liens, mais n’avait jamais osé les réaliser.
— Alors ? Qu’en dis-tu ?
S’approchant, il dénoua la ceinture de son peignoir et le vêtement tomba à terre. Après lui avoir pris le foulard de soie des mains, il le fit passer sur ses épaules, autour de son cou, sur ses seins, puis étira le tissu entre ses mains, l’enroulant autour de ses poignets.
Une bouffée d’excitation la submergea. Elise oserait-elle ? Oh, oui ! Sans la moindre hésitation. Rien n’était plus excitant que de braver l’interdit.
Penchant la tête sur le côté, Meghan posa une main sur sa hanche en une attitude provocante.
— Est-ce que j’ai l’air effrayé ?
— Tu es incroyablement belle.
Ses yeux clairs et intenses brillaient d’un feu intérieur, remarqua-t?elle avec délice. Elle y lisait de l’admiration mêlée à une émotion indéfinissable. Tout à coup, avant qu’elle ait eu le temps de réagir, il posa le foulard sur ses yeux et le lui attacha derrière la tête.
Elle ferma les paupières sous le bandeau, déroutée par l’afflux soudain de sensations. Une fois de plus, l’atmosphère se chargea d’électricité. Il effleura ses cheveux d’une caresse tendre et rassurante, mais sans prononcer un mot.
Sa peau dégagea une odeur de savon lorsqu’il la souleva dans ses bras. Désorientée, elle se laissa transporter à travers la pièce jusqu’au lit. Il l’allongea sur les draps frais et la laissa là.
Elle ne le voyait pas, ne le touchait plus. Nue à l’exception de l’écharpe de soie, elle se sentit brusquement vulnérable, exposée. Elle serra ses bras autour d’elle en un geste protecteur, croisa et décroisa les jambes nerveusement. Enfin, elle s’obligea à se détendre. Le cœur battant, impatiente, elle attendit la suite.
Aveuglée par le bandeau, elle avait une conscience aiguë de sa respiration haletante, de la moiteur à la naissance de ses cuisses, de la brise légère soufflant sur son corps nu. Cela ressemblait tellement à ce qu’elle avait décrit dans son journal — l’obscurité totale, l’attente qui se prolongeait, augmentant l’excitation, l’homme qui allait la posséder et dont elle ne faisait que deviner la présence… Si ressemblant, et pourtant si différent.
Enfin, Nick vint la rejoindre sur le lit.
Elle tressaillit lorsqu’il posa la main sur son épaule, et devança la caresse de sa bouche sur la sienne.
Ses lèvres étaient douces et tièdes, sa langue experte et son baiser envoûtant. Seules leurs bouches se touchaient, et ce point de contact entre leurs deux corps semblait concentrer toute leur passion. Des vagues de désir déferlèrent jusqu’au creux de ses cuisses tandis qu’elle laissait échapper un gémissement sourd.
Il se retira subitement, la laissant frustrée et désemparée. Ses inhibitions s’étaient envolées. Elle tendit la main vers lui, sans parvenir à l’atteindre. Et elle eut une brève seconde d’inquiétude, toute seule dans ce noir absolu.
Le fantasme et la réalité se confondaient, intensifiant le sentiment d’excitation face à l’inconnu. Une sorte d’instinct primitif lui fit deviner la présence de Nick à côté d’elle, immobile et silencieux. Elle sourit. Il voulait l’observer ? Elle allait lui en donner pour son argent.
Posant les mains sur ses seins fermes, elle commença à les pétrir doucement. Elle frotta les mamelons à l’aide de ses pouces. Les petites pointes réagirent aussitôt en se dressant contre ses doigts. Un petit gémissement s’échappa de sa gorge, et elle écarta les jambes, ondulant doucement des hanches, frottant ses fesses en rythme contre les draps. Ses mains entamèrent alors une lente descente, effleurant son ventre, sa toison, jusqu’à trouver l’épicentre humide de son désir.
Nick laissa échapper un râle, et elle s’esclaffa tout en continuant à se caresser. Non seulement elle donnait libre cours à sa vraie nature, mais elle avait réussi, malgré le bandeau, à reprendre le dessus : il était de nouveau à sa merci.
Elle lui fit signe de s’approcher, et ses mains vinrent se mêler aux siennes, accompagnant, encourageant ses mouvements. Lorsque ses doigts la pénétrèrent, elle cria de plaisir, avant de gémir de frustration quand il les retira.
— Oh, je t’en prie…
Le parfum enivrant d’une rose chatouilla ses narines juste avant qu’elle sente la caresse des pétales soyeux sur ses lèvres. Il fit aller et venir la fleur sur sa joue, dans le creux de son cou, sur ses épaules, d’un sein à l’autre… Elle tressaillait à chaque fois, impatiente de savoir quel chemin la rose allait ensuite emprunter.
La fleur descendit sur ses cuisses, tiédie par la chaleur de sa peau, et remonta doucement. Alors que les pétales effleuraient son sexe, Nick prit la pointe d’un de ses seins dans sa bouche. Il le suça, le lécha, le martyrisa jusqu’à ce qu’elle n’en puisse plus. Totalement abandonnée aux sensations, elle écarta les jambes sans la moindre pudeur, lui offrant son sexe ouvert en gémissant.
— Nick !
— Chut, tu n’es pas encore prête…
— Oh, si !
— Chuuuut…
Elle frissonna lorsque les pétales de rose tombèrent en pluie sur sa peau nue. Son odeur de shampoing montant à ses narines, il lui lécha le cou, la gorge, les seins, avant de reprendre sa bouche. Puis il s’allongea sur elle.
Elle enroula les jambes autour de sa taille. Son sexe dur vint buter contre sa chair incandescente, et elle l’accueillit en elle en criant son nom. Enfouissant son visage dans son cou, elle colla tout son corps contre le sien. Leurs cœurs battaient à l’unisson.
Leur passion se déchaîna, les entraînant dans un corps à corps sauvage. Elle se tordit sous lui, l’attirant et le repoussant. Ses jambes nouées autour de sa taille l’enferraient en une prise indéfectible. Il glissa ses mains sous ses fesses avant de la plaquer contre lui, la pénétrant de toute sa puissance et de tout son être.
Le plaisir lui arracha un cri aigu, et elle s’agrippa à lui, parcourue de frissons. Avec un cri rauque, il jouit violemment en elle tout en la maintenant plaquée contre lui.
Enfin, ils se laissèrent retomber sur le lit défait, épuisés, le souffle court. Nick lui retira son bandeau et essuya tendrement son front où perlaient de fines gouttes de sueur.
Elle se laissa aller contre lui, saisie par un sentiment de plénitude. Le visage enfoui dans sa poitrine, elle écouta le martèlement de son cœur contre son oreille. Il chuchota dans ses cheveux quelque chose qu’elle ne comprit pas. Peu importe, l’étreinte de ses bras en disait long.
A sa grande surprise, les émotions la dépassaient. Si Nick avait révélé en elle l’amante passionnée, il avait aussi touché la femme. Les sentiments qu’elle éprouvait à son égard la bouleversaient, d’autant plus qu’elle ne pouvait pas lutter.
Je l’aime. J’aime Nicholas Alexander.
Au lieu de se sentir comblée, elle en voulait encore. Elle voulait plus, elle voulait toujours. C’était comme si elle était amoureuse pour la première fois.
Sur son balcon, Alex fumait une cigarette. Il avait laissé un petit mot à Meghan lui indiquant qu’il devait voir son client et qu’il la retrouverait à 19 heures. Mais il avait cherché Braga en vain.
Il tira une bouffée de sa cigarette avec impatience. Où était passé son contact ? Déjà qu’ils n’arrivaient pas à localiser Ramos… Est-ce que l’opération était en train de tourner au fiasco ? Ou avait-il complètement négligé sa mission à force de penser à Meghan ?
Il soupira. Il se sentait écartelé entre désir et devoir. Meghan méritait mieux que ça. Il voulait qu’elle fasse partie de sa vie, mais quel genre de vie pouvait-il lui offrir ? Des semaines d’absence. Un coup de fil de temps en temps.
Encore des secrets et des mensonges…
Il écrasa sa cigarette dans le cendrier posé sur la table. Quel salaud il faisait. S’il ne pouvait pas tout lui avouer, au moins devait-il lui rendre son journal.
Bon sang ! Pourquoi les choses se compliquaient-elles toujours ? Ne pouvait-il pas être simplement un gars ordinaire amoureux d’une femme extraordinaire ? Il était comme pris au piège. Mais il n’avait pas le choix. Une fois l’enquête bouclée, il lui raconterait tout. Il n’aurait plus qu’à prier pour qu’elle veuille encore de lui.
Meghan s’avança vers lui, drapée dans un fourreau de soie rouge. Fasciné par le balancement de ses hanches, il dut s’obliger à détacher son regard de sa silhouette. Ses sandales rouges à talons aiguilles lui donnaient une allure incroyable.
— Tu es sublime, ce soir, Beauté fatale.
— Merci. J’aimerais pouvoir te retourner le compliment, mais je ne m’habituerai jamais à ce motif vert et or tout droit sorti d’un film d’horreur.
Comme elle levait les yeux au ciel, il éclata de rire.
— Où m’emmènes-tu ? demanda-t?elle.
— Je t’avais promis quelque chose de spécial pour ce soir et c’est presque l’heure.
— Tout a été spécial, pour moi, ces trois derniers jours, répliqua-t?elle en souriant.
La tendresse qu’il lut dans ses yeux ajouta à son sentiment de culpabilité.
La prenant par le bras, il l’emmena dans les rues de la ville. Elle écarquilla les yeux de surprise lorsqu’ils arrivèrent à Mallory Square.
Des stands avaient été montés, proposant des objets artisanaux, et une foule joyeuse passait de l’un à l’autre. Aux quatre coins du parc, des musiciens jouaient des airs gais, entourés de nombreux spectateurs.
— Oh, Nick, c’est un festival !
— Le mieux, c’est qu’il a lieu tous les soirs.
— Tous les soirs ? Vraiment ?
Il éclata de rire devant sa joie enfantine.
— Bienvenue dans la seule ville au monde où l’on célèbre tous les soirs le coucher du soleil !
Le soleil couchant enflammait le ciel, s’éclipsant lentement derrière l’horizon dans un dégradé de rose, d’orange et de jaune. Lorsque le dernier rayon eut disparu dans la mer, la foule applaudit. Reprenant leurs instruments, les musiciens se mirent à jouer des airs plus langoureux, et des couples se formèrent.
Meghan prit Nick par la taille.
— C’est magnifique. Merci de m’avoir fait partager ce moment avec toi.
Il la prit dans ses bras et plongea son regard dans le sien. Le crépuscule donnait à son visage un éclat mystérieux, accentué par l’ombre dorée sur ses paupières.
— Je dois te confier quelque chose, Beauté fatale. Je ne suis pas venu à Cayo Sueño dans l’intention de rencontrer quelqu’un. Au contraire.
Il lui sembla qu’elle retenait son souffle, et elle se raidit contre lui. Il hésita, se demandant s’il était encore trop tôt pour lui avouer ce qu’il ressentait.
— Moi non plus, avoua-t?elle. Tout ce que je cherchais, c’était une aventure sexuelle, rien de plus. Je ne m’attendais pas à… ça.
Alex crut que son cœur s’arrêtait de battre dans sa poitrine. Dis-le, je t’en prie, dis-le-moi. Si elle le disait d’abord, il se jetterait à l’eau.
Elle baissa la tête, un léger sourire aux lèvres. Dans la pénombre, il crut déceler une nuance de rouge sur ses joues.
— Je… je ne suis pas sûre. Mais j’aime beaucoup ça. Je t’aime beaucoup.
O.K., c’est pas mal. C’est même bien.
— Moi aussi, je t’aime beaucoup, répondit-il sans parvenir à aller plus loin.
Croisant les bras sur sa poitrine, elle fit semblant d’être fâchée.
— C’est tout ?
Il lui sourit gaiement.
— Bon, d’accord, je t’aime vraiment beaucoup.
— Nick ! protesta-t?elle.
— Hé ! c’est plus que ce que tu m’as dit, toi.
— Oui, mais je l’ai dit la première. Tu dois faire mieux.
Il pencha la tête sur le côté, comme s’il étudiait la question.
— Est-ce que tu veux qu’on continue à se voir ? demanda-t?il finalement.
Eclatant de rire, elle le prit par le cou.
— Tu me rends folle.
Il la contempla, empli d’un sentiment de tendresse.
— Moi aussi, je suis fou de toi.
— Alors, que fait-on ?
Comment lui répondre ? Il aurait dû être en train de travailler sur le cas Ramos. Mais il ne pouvait se détacher d’elle. Elle lui donnait tout ce qu’il avait jamais désiré — sauf qu’il ne pouvait l’accepter. Parce que rien n’était vrai. Elle était tombée amoureuse de quelqu’un qui n’était pas vraiment lui.
Il répondit par une pirouette.
— On va manger !
Il l’entraîna vers une grande bâtisse coloniale entourée d’un jardin à la végétation luxuriante. On les installa à une petite table près d’une porte-fenêtre d’où ils surplombaient les massifs de fleurs et les palmiers.
Meghan porta un regard appréciateur sur le mobilier art déco.
— On se croirait dans un bistrot élégant de la Rive Gauche.
— La maison a été bâtie en 1887, mais l’hôtel Saint-Pierre n’a ouvert ses portes qu’en 1921. Ils ont vingt-sept chambres, toutes différentes. Le restaurant sert une cuisine contemporaine d’inspiration française.
— Tu dois venir souvent.
— Non, j’ai lu leur brochure publicitaire.
Elle s’esclaffa et se plongea dans le menu. Adossé à sa chaise, il l’admira à son aise, étonné d’être aussi affamé. Et pas seulement de nourriture. Elle avait sur lui un pouvoir incroyable. Il sentait son sexe durcir rien qu’en caressant des yeux ses lèvres pleines et charnues.
Baissant son menu, elle surprit son regard.
— Quoi ?
— On pourrait passer directement au dessert. J’ai un désir irrépressible de te couvrir de sauce au chocolat et de crème Chantilly… et de te lécher.
Il vit une lueur intéressée passer dans ses yeux, mais elle grimaça.
— Tu veux me faire mourir de faim ? D’abord, on mange le plat principal à table.
— D’abord ? répéta-t?il, plein d’espoir.
— On en reparle dans un instant, répondit-elle en se levant. Je vais me repoudrer le nez.
Il la regarda s’éloigner, remarquant avec fierté les coups d’œil admiratifs sur son passage.
Il devait bien y avoir une solution, songea-t?il. Ces prochains mois, elle allait être très prise par ses études. Peut-être qu’une relation épisodique lui conviendrait ? En attendant mieux ?
Tout en tambourinant des doigts sur la table, il balaya distraitement la salle des yeux. C’est alors qu’une femme à l’allure tapageuse retint son attention. Aussitôt, un goût de bile lui monta à la gorge, et il sentit une bouffée d’adrénaline se répandre dans ses veines. Si Vivian était là, Frankie Ramos ne devait pas être bien loin.
Les choses sérieuses allaient commencer.