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une femme providentielle( ÑÇÆÚÉ)

une femme providentielle de Myrna MACKENZIE A quelques jours du banquet qu’il organisait en l’honneur d’Olivier Davis – l’homme à qui il devait sa fortune, Jackson a bien

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une femme providentielle


de Myrna MACKENZIE

A quelques jours du banquet qu’il organisait en l’honneur d’Olivier Davis – l’homme à qui il devait sa fortune, Jackson a bien cru qu’il allait devoir tout annuler, son cuisinier s’étant cassé la jambe. Et voilà que la providence lui envoyait une cuisinière, compétent, charmante… et enceinte de huit mois ! Jackson n’avait pas le choix, il allait embaucher la belle Helena. Mais au-delà de ses craintes quant aux talents culinaires de la jeune femme, Jackson était assailli d’autres doutes, plus ambigus. Lui, le célibataire endurci, millionnaire de surcroît, n’avait pas l’intention de donner de faux espoirs à une femme fragile. Mais Helena était si pétillante, si pleine de vie, que Jackson se demandait s’il résisterait longtemps à la tentation…0

 
 

 

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chapitre 1

— N’y va pas, Helena. Tu risques de tomber sur une femme nue dans sa salle de bains, si ce n’est sur plusieurs !
Le bruit de voix troublant la sérénité de ce coin paisible de la côte du Maine attira l’attention de Jackson Castle. Il posa sa tasse de mauvais café sur la table basse et se dirigea vers la fenêtre ouverte de la spacieuse villa louée la veille. Et le spectacle qu’il découvrit le stupéfia. Une beauté aux cheveux blond vénitien faisait face à quatre solides gaillards qui la dévisageaient bras croisés, sourcils froncés. Accotée à sa voiture, la jeune femme souriait avec aplomb, insoucieuse de sa position d’infériorité.
— Ecoutez, les garçons, vous savez que je vous aime beaucoup mais je vous répète pour la cent millionième fois que vous êtes mes frères, pas mes anges gardiens ! De plus, vous n’avez aucune raison de vous inquiéter, les femmes nues ne me font pas peur. Il m’arrive moi-même de me trouver dans cette situation.
— Tu sais très bien ce que nous voulons dire, Helena. Il est hors de question que tu travailles pour Jackson Castle, pas dans ces conditions d’intimité, en tout cas !
« Intéressant », pensa Jackson, les sourcils levés. Cette jeune personne devait être Helena Austin, la cuisinière engagée en remplacement de son maître d’hôtel qui s’était malencontreusement cassé un bras le jour de son arrivée. Et ses frères refusaient qu’elle travaille pour lui ?
— Je sais pourquoi l’idée vous déplaît, Bill, rétorqua la jeune femme. Vous avez prêté l’oreille aux bruits qui circulent en ville insinuant que M. Castle collectionne les femmes comme d’autres les timbres-poste !
Un des frères émit un reniflement de mépris.
— Je n’ai pas besoin de la rumeur pour juger. J’ai vu Castle hier en ville, je sais à quoi il ressemble. Et puis, pourquoi aurait-il loué une villa de huit chambres s’il comptait rester seul ? A quoi crois-tu que vont servir tous ces lits ?
— A dormir, Hank ? suggéra la beauté, un tranquille sourire aux lèvres.
— A dormir avec un tas de femmes, oui ! Avec toi, peut-être ! répliqua le voisin de Hank.
— Allons, Thomas, sois sérieux ! Regarde-moi avant de proférer des énormités pareilles !
A ce moment, un des hommes bougea, permettant à Jackson de découvrir la jeune femme dans son intégralité. Un bref cri de surprise lui échappa. Elle était enceinte ; et pas loin de son terme, à ce qu’il pouvait en juger.
— Si tu crois que ça change quelque chose, grommela Thomas.
« Désolé de te contredire, mon vieux, murmura Jackson, mais ça change tout, au contraire. » Si cette femme était bien celle qu’il pensait, il n’était pas du tout certain qu’il l’engage. Elle était charmante, ce qui représentait un atout à ses yeux, mais enceinte… Et ses relations avec les femmes enceintes avaient toujours été difficiles, à commencer par le jour où sa mère avait donné naissance à un enfant non désiré dans un quartier sordide et sombre, pour finir par celui où sa femme lui avait annoncé qu’elle portait l’enfant d’un autre. Il n’avait aucune intention de rajouter le moindre chapitre à ce lamentable roman.
En même temps, il éprouvait malgré lui une certaine tendresse pour ces femmes qui traversaient une délicate période de leur existence. Cette jeune personne, par exemple, aurait eu besoin d’une protection que ses frères, obnubilés par sa réputation, étaient bien incapables de lui offrir. Comment ne se rendaient-ils pas compte qu’elle ne devrait pas s’exposer si longtemps au soleil ?
Il sortit, traversa la terrasse de bois et descendit les marches qui menaient à la plage.
Après la mauvaise nuit qu’il venait de passer — le projet sur lequel il travaillait l’ayant tenu longuement éveillé — il ne devait pas se présenter sous son meilleur jour : cheveux noirs en bataille, chemise froissée, ouverte sur son torse, et barbe de trois jours. En clair, il ressemblait davantage au voyou qu’il avait été qu’au milliardaire qu’il était devenu. Mais ce n’était pas plus mal ; il avait justement besoin de se montrer impressionnant.
Il s’éclaircit la gorge.
— Que puis-je pour vous, messieurs ?
Celui qui se tenait le plus près de la jeune femme se redressa, la mine sombre.
— Rien du tout. Nous partions. Allons, viens, Helena.
Cependant, la jeune femme secoua la tête. Levant les yeux sur Jackson, elle lui sourit poliment tout en s’approchant. Jackson remarqua alors la couleur aigue-marine de ses yeux.
— Bonjour ! Monsieur Castle, je présume ? J’espère que nous ne vous avons pas réveillé. Vous avez probablement deviné que je suis Helena Austin, votre nouvelle cuisinière. Si cela convient, je suis prête à prendre mon service.
Jackson commençait à comprendre pourquoi ses frères se montraient tellement protecteurs avec elle. Ses yeux étaient comme des fenêtres ouvrant sur une âme pure et sa voix grave et douce donnait des frissons… Jackson dut faire un effort pour se remémorer qu’elle ne lui proposait que des services strictement professionnels.
Puis elle se retourna pour adresser à ses frères un sourire espiègle.
— Nous ne sommes pas venus ensemble, déclara-t elle ; mes frères ont simplement profité d’une pause pour venir me souhaiter bonne chance. C’est bien ça ? termina-t elle en se tournant vers eux.
— Helena…, s’écria le prénommé Thomas.
Elle le toisa d’un air mé*******.
— S’il te plaît, il s’agit de mon travail.
Elle avait prononcé le mot avec emphase, comme s’il s’agissait de sa vie.
— Enchanté, madame Austin, dit Jackson, ignorant délibérément les regards furibonds de ses frères.



Ils seraient sans doute heureux d’apprendre qu’il partageait entièrement leur point de vue. Helena possédait énormément de charme, sa voix aurait rendu fou de désir n’importe quel homme et, avec ses longs cheveux dorés, elle évoquait quelque lady Godiva à califourchon sur un cheval, uniquement vêtue de sa somptueuse chevelure. Bref, elle était beaucoup trop séduisante pour une employée qu’il était censé fréquenter quotidiennement. Il éprouvait déjà l’irrésistible envie de poser ses lèvres sur son épaule nue puis de les promener un peu plus bas… geste impossible à envisager. Il n’était pas homme à s’engager et une femme enceinte avait certainement d’autres besoins qu’une aventure passagère.
— Je désire travailler chez vous, déclara avec assurance la jeune femme.
Jackson retint un sourire. A sa place, aurait-il su adopter un ton léger face à quatre géants mé*******s ? Leur stature l’écrasait et cette impression de fragilité était encore renforcée par son état. Cependant, son regard brillait de détermination et elle arborait l’air d’un enfant de quatre ans qui feint de croire qu’il n’y a pas croque-mitaine sous son lit alors que même un bébé sait que les monstres existent.
Jackson avait affronté sa part de monstres. Il les avait combattus et réduit à l’impuissance et c’est pourquoi il éprouvait, à son corps défendant, de la sympathie pour la jeune femme.
Son sourire dut toucher un point sensible car elle confia :
— Habituellement, ils ne mordent pas. Ce matin, ils sont juste un peu énervés parce qu’ils ont joué au poker une partie de la nuit. Et puis, il me trouvent parfois un peu têtue.
— Un peu têtue ? s’exclama Hank. Ecoute, Helena, il faut que nous parlions. J’ai l’impression que tu as oublié que nous devions déjeuner ensemble aujourd’hui.
Elle écarquilla ses grands yeux aigue-marine.
— Tu ferais bien de faire mesurer ton nez par Annette pour voir s’il ne s’est pas allongé, Hank ! Par ailleurs, je déjeunerai volontiers avec vous. La semaine prochaine, si ça vous convient.
Le regard de Hank se chargea d’orage.
— Tu as tort de t’entêter, répliqua-t il avec brusquerie. Je veux simplement t’empêcher de foncer sans réfléchir au risque de commettre une regrettable erreur.
Tout en parlant, son regard tomba sur le ventre arrondi de sa sœur. Ce qu’elle ne manqua pas de remarquer et qui lui fit redresser la tête. Instantanément, son frère prit une expression contrite.
— Désolé, euh… je ne voulais pas…
— Je sais très bien que tu ne voulais pas.
Cette fois, ce fut une franche admiration qu’éveilla chez Jackson le frêle personnage en même temps que le comportement de ses frères déclenchait sa colère. Il s’avança d’un pas. S’il ignorait les circonstances de la grossesse de la jeune femme, une pareille attaque devant un étranger ne pouvait que l’humilier. Ce n’était vraiment pas le lieu pour une pareille conversation ! S’il changeait d’avis au sujet de l’embauche d’Helena, il ne la congédierait pas en public, même si ce public lui était intimement lié. Il agirait discrètement, en tête à tête.
Jackson tourna son attention vers les quatre mousquetaires.
— Dommage que nous ne puissions poursuivre cette discussion. Mme Austin et moi avons à parler affaires et, pour cela, nous serons mieux installés à l’intérieur.
Il entreprit de boutonner sa chemise de cet air princier qu’il avait adopté du jour où on l’avait tiré des rues de cette ville pour lui donner sa chance.
— Si vous voulez bien nous excuser…
Il offrit son bras à Helena.
— Madame Austin ?
Avec un regard d’excuse pour ses frères, elle posa sa main délicate sur l’avant-bras de Jackson. A travers le fin tissu de sa chemise, il en perçut la chaleur et ne comprit encore une fois que trop bien l’inquiétude de ses frères. Les hommes ne pouvaient qu’être attirés par elle et sous l’effet de cette attirance, agir inconsidérément.
Les hommes, mais pas lui.
— Nous en reparlerons plus tard, dit-elle à ses frères.
— Parfaitement, dit Bill.
Elle se tourna vers Jackson. Quand elle lui sourit, il eut l’impression que des milliers de fleurs s’épanouissaient brusquement. Elle possédait vraiment un sourire dévastateur.
Il la guida vers l’escalier puis ils traversèrent la terrasse. Il ouvrit la porte et s’effaça pour la laisser pénétrer dans la vaste cuisine bleue et blanche qui occupait l’arrière de la maison.
— Asseyez-vous, je vous en prie, dit-il en lui désignant un siège.
Tout en prenant place, elle examina la pièce.
— Je suis navrée de vous avoir imposé cette scène.
— Ce n’est pas grave.
— Mes frères se sont toujours montrés très protecteurs avec moi mais ces derniers temps, c’est devenu encore bien pire.
— Ils se préoccupent de votre sort.
— Certainement. Ils n’ont toutefois aucune raison de s’inquiéter. Comme vous le savez, je ne suis là que pour faire la cuisine.
Sous son regard intense, il comprit qu’elle craignait qu’il n’ait surpris leur conversation et tentait de se dédouaner.
Il considéra le pathétique pot de café vaseux confectionné par ses soins.
— J’ai vraiment besoin d’une cuisinière, murmura-t il comme pour lui-même.
Helena suivit son regard et éclata de rire.
— Vous avez pourtant tout l’équipement nécessaire pour préparer de somptueux repas, monsieur Castle !
Elle sauta sur ses pieds, réduisant à néant les efforts de Jackson pour qu’elle se repose, et fit le tour de la cuisine, examinant les moindres recoins avec un intérêt passionné, caressant du bout des doigts la surface polie du plan de travail central, se délectant voluptueusement de l’odeur de résine des placards de bois, passant la paume de sa main sur le réfrigérateur haut de gamme..00
Un léger soupir lui échappa.
— Ce lieu est un rêve pour un cuisinier, murmura-t elle. Je ne suis pas sûre que vous compreniez mais, pour moi, votre cuisine s’apparente au pays des merveilles. Tout ce bois blond, ces vitrages… Ce sont des installations superbes.
Le choix des mots faillit faire sourire Jackson mais, au bout du compte, évoquer le pays des merveilles n’était pas si déplacé puisque, en observant le mouvement des lèvres d’Helena, il apparut à Jackson qu’elles ressemblaient à du sucre rose et il éprouva le désir de les écraser sous les siennes pour en goûter le suc.
Il prit une profonde inspiration en se rappelant qu’il s’agissait d’un entretien d’embauche et que la bouche d’Helena Austin était l’égal du fruit défendu. Il n’employait pas les femmes qu’il désirait. C’était aller au-devant de trop de complications. De plus, désirer une femme enceinte ne ferait que lui rappeler une période de son existence qu’il préférait oublier. Cependant, il pressentait déjà que ce ne serait pas si simple d’expliquer à cette jeune femme qu’elle ne faisait pas l’affaire, d’autant qu’elle couvait déjà amoureusement des yeux l’équipement de sa cuisine.
— Je suis ******* que vous appréciiez, dit-il d’un ton prudent.
— J’apprécie beaucoup et je regrette que vous ayez eu à vous démener pour y mettre quelqu’un. Abe Howard, de l’agence pour l’emploi, m’a expliqué que vous vous étiez inopinément retrouvé sans cuisinier. C’est une situation terriblement embarrassante.
A l’entendre, on aurait dit qu’il n’existait pas de problème plus grave que le fait qu’il se retrouve temporairement privé de personnel. La sympathie qu’il lut dans son regard l’émut fugitivement et il regretta d’avoir à la renvoyer alors qu’elle désirait si manifestement travailler ici.
Et puis, son regard glissa le long de son corps. Elle avait beau être adorable, elle n’en restait pas moins aussi désirable, enceinte, que deux minutes auparavant.
— Madame Austin…, commença-t il.
— Helena, rectifia-t elle. Oh ! mais j’y pense, il est tôt et vous n’avez sans doute pas pris de petit déjeuner. Si vous voulez, je me glisse dans un tablier et je vous en prépare un !
Jackson, qui se glorifiait de garder la tête froide en toutes circonstances, se demanda par quel miracle les mots « se glisser dans un tablier » prenaient soudain des consonances érotiques. Parce qu’il n’était pas debout depuis une demi-heure et qu’une jolie jeune femme lui proposait d’une voix caressante de lui préparer son repas ? Ces pensées incongrues lui firent froncer les sourcils. Ni la voix d’Helena Austin ni ses vêtements ne le concernaient. D’autant qu’elle ne resterait pas à son service. Il n’avait pas dû se montrer assez précis auprès d’Abe à propos du profil du candidat.
— J’apprécie que vous vous soyez si rapidement présentée, Helena, dit-il, adoptant machinalement le ton de commandement qui lui avait si bien réussi, cependant, s’il est vrai que je me suis brusquement trouvé à court de cuisinier, j’aurais dû préciser certains points à Abe. Il me semble, pardonnez-moi, que vous attendez un enfant.
Elle haussa les sourcils et sourit.
— Vous êtes très perspicace, monsieur Castle.
Il ne put s’empêcher de lui rendre son sourire.
— Très bien, Helena, vous êtes vraiment enceinte.
— Est-ce un problème ?
C’était plus qu’un problème. Néanmoins, employant du personnel depuis un certain nombre d’années maintenant, il connaissait les lois. D’ailleurs, même s’il n’avait pas existé de loi, peut-on refuser une employée compétente par commodité personnelle, même si cette commodité personnelle est vitale ?
Jackson se promettait de se montrer plein de tact pour lui annoncer la mauvaise nouvelle quand elle se pencha vers lui dans l’attente de sa réponse, et une bouffée de son parfum citronné monta à ses narines. Il la vit brusquement effleurant de ses doigts chargés de parfum l’endroit de la gorge où bat le pouls, le creux de son genou, l’espace entre ses seins. Il eut aussi la vision de lui-même se précipitant dans le vide du haut d’un immeuble. Le saut était réussi ; c’était l’atterrissage sur sol dur qui posait problème…
A grand-peine, Jackson s’arracha au parfum d’Helena Austin. Sa libido semblait détraquée ce matin. Malgré sa virilité, il ne se livrait jamais à ce déshabillage imaginaire de ses employées. Vraiment, il réprouvait ce genre de comportement.
— Alors, monsieur Castle, insista Helena, est-ce un problème ?
« Réfléchis vite, Castle », se dit-il. Cependant, il remarqua qu’elle ne portait pas d’alliance à sa main gauche Pas d’obstacle social évident donc ; seulement ses propres interdictions, fruits d’une douloureuse expérience. Un homme incapable d’éprouver de profondes émotions ne devrait jamais approcher de trop près une femme vulnérable. Or Jackson n’imaginait pas plus vulnérable qu’une femme qui s’apprête à mettre au monde un enfant dépourvu de père.
Il s’éclaircit la gorge.
— Je vais beaucoup recevoir durant mon séjour à Sloane’s Cove, expliqua-t il. Henri, mon cuisinier habituel, est un homme costaud, capable de porter de lourds plateaux ou de pousser des meubles et de rester debout des heures durant en cas de nécessité. Malheureusement, hier, il s’est cassé le bras en tombant dans les rochers et a dû être rapatrié à Boston.
— Je sais. J’espère que sa blessure n’est pas trop grave et qu’il pourra de nouveau cuisiner.
— Bien sûr. Abe vous a donc parlé d’Henri ?0
Elle secoua la tête.
— Le bouche à oreille est efficace dans des villes comme la nôtre.
Comme il la considérait avec curiosité, haussant une épaule, elle ajouta :
— Pour être touristique, au fond, Sloane’s Cove a gardé une mentalité de petite ville. Les nouvelles s’y répandent comme traînée de poudre, aussi n’avons-nous pas de secret les uns pour les autres !
« Dommage », pensa Jackson. Car il avait un secret qu’il ne tenait pas à voir divulguer dans l’immédiat.
— Quoi qu’il en soit, ce que j’essaie de vous expliquer, Helena, c’est que je cherche quelqu’un de résistant à la fatigue.
C’était vrai, même si ce n’était pas la véritable raison de ses réticences. Comment cependant expliquer à une employée qu’on ne l’engage pas parce qu’on la trouve trop désirable ?
Elle le considéra, une nuance de sympathie dans ses grands yeux aigue-marine, puis secoua la tête.
— Ne me sous-estimez pas, monsieur Castle. Vous ne sauriez croire ce dont je suis capable. Plus important, je dois vous dire en toute honnêteté que vous n’avez pas le choix. Nous sommes sur la côte du Maine, fin juin. La saison touristique est déjà commencée ; trouver un bon cuisinier maintenant relèverait du miracle !
Machinalement, la main de la jeune femme s’était posée sur son ventre, comme si elle voulait protéger son enfant du rejet de Jackson. Devant ce geste, ce dernier éprouva une brusque culpabilité. Même s’il était tout jeune la dernière fois qu’il avait dû se préoccuper de savoir comment se procurer son prochain repas, il n’oublierait jamais l’angoisse qu’on ressent dans ces circonstances.
— Je vais insister auprès d’Abe pour qu’il vous trouve un emploi, dit-il gentiment.
— Je n’ai pas exactement besoin de travailler, rétorqua-t elle avec la même douceur.
— Dans ce cas…
— Dans ce cas, vous vous demandez ce que je fais ici ?
Devant ses grands yeux à la teinte si rare qui pétillaient de malice, Jackson se demanda à quoi ils ressemblaient dans une étreinte. Avec un léger sursaut, il se ressaisit.
— Oui, pourquoi êtes-vous ici ?
Elle inspira une bouffée d’air.
— Je… Bon, comment dire ? Abe est un vieil ami. Il cherchait quelqu’un pour vous. Venant de quitter un emploi, j’étais libre quand il a pris contact avec moi ce matin. De plus, il sait que je suis folle de votre cuisine.
Jackson ne put retenir un sourire.
— Oh ! bien sûr… ma cuisine.
Elle hocha la tête.
— Il y a trois ans, je travaillais ici quand M. et Mme Hamilton, qui en étaient alors propriétaires, faisaient effectuer des travaux de rénovation. Et ils m’ont demandé de les aider à concevoir la cuisine de leurs rêves. Malheureusement, Mme Hamilton est morte cet hiver-là et la maison est restée fermée depuis lors. C’est le premier été que M. Hamilton se décide à louer.
— Ainsi, vous voulez travailler chez moi à cause de mon compacteur de détritus et de mon réfrigérateur ?
— Sans oublier votre incroyable mixer ! Mais surtout, j’ai besoin d’acquérir de l’expérience. Je n’ai pas vraiment besoin d’argent. L’assurance vie de mon mari me permet de vivre confortablement. Seulement, j’invente des recettes et écrit des livres de cuisine depuis que j’ai accès aux fourneaux. C’est plus qu’un moyen d’existence : une passion qui demande à trouver un public sur qui tester mes recettes. Abe m’a dit que vous receviez beaucoup, ce qui est peu courant par ici, même chez les plus fortunés. La plupart des gens se réfugient justement à Sloane’s Cove pour fuir le stress, alors, oui, vous faites fabuleusement l’affaire, d’autant que je travaille plus particulièrement en ce moment sur les menus de réceptions !
Jackson dissimula un sourire.
— Je fais l’affaire, n’est-ce pas ?
— Fabuleusement ! répéta-t elle.
— Y a-t il une autre raison pour laquelle je devrais vous engager ? demanda-t il en soupirant.
Elle le dévisagea avec de grands yeux innocents.
— Oui, naturellement.
— Pourriez-vous préciser ?
Elle haussa ses délicates épaules.
— Je suis une excellente cuisinière, et je cède vingt pour cent de mes droits d’auteur au service de pédiatrie de l’hôpital de Sloane’s Cove. M’aider à terminer mon livre le plus vite possible serait œuvre charitable.
— Qui vous dit que j’ai l’âme charitable ?
Tout le monde ignorait les raisons de sa venue ici ; le secret avait été bien gardé, il en était certain.
Elle parut légèrement désappointée.
— Je sais que vous êtes un homme très occupé, monsieur Castle, mais pas au point de ne jamais regarder la télévision. Un portrait de vous est paru dans l’émission : « Les célibataires les plus fortunés du monde », il y a à peu près un mois. Le commentateur mentionnait votre participation à de nombreuses œuvres caritatives.
Le sang de Jackson se glaça dans ses veines.
— Les célibataires les plus fortunés du monde, répéta-t il faiblement.
Il lui semblait se rappeler vaguement avoir entendu son assistante mentionner que son visage avait paru sur les écrans de la télévision nationale mais, se trouvant en rendez-vous avec un de ses plus fidèles clients — son métier consistait depuis des années à localiser jouets, babioles et œuvres d’art pour les grands de ce monde —, il avait relégué cette histoire au second plan.
A présent, cette émission revêtait une importance inattendue, mais surtout parce que, en l’évoquant, la ravissante Mme Austin se paraît de tons de rose qui rehaussaient magnifiquement la peau laiteuse de ses joues, de son cou mince et de la gorge délicate qui apparaissait dans l’échancrure de sa robe bleu pâle. Elle était enceinte, et seule, à une période ou aucune femme ne souhaite vraisemblablement l’être. En pensant qu’elle portait l’enfant d’un autre, une vision déconcertante de son ex-femme et de son ex-associé s’imposa à lui. Il la repoussa avec fermeté.0
— Vous prononcez « célibataires les plus fortunés du monde » comme si je cherchais à m’en approprier un ! dit-elle brusquement. Rien n’est plus éloigné de la vérité, monsieur Castle. Sans vouloir vous blesser, je ne vous porte aucun intérêt, pas plus qu’à un autre, fût-il milliardaire. J’ai eu un mari et n’en désire pas d’autre. Tout ce que je veux, c’est cuisiner pour vous et tenir votre intérieur. Si vous m’engagez, je puis vous assurer que je ne vous offrirai que les meilleurs échantillons de ma cuisine et que je ne vous submergerai pas sous des regards implorants, à moins que vous ne mainteniez une recette précieuse hors de ma portée !
Ces simples paroles firent éprouver à Jackson un sentiment de honte. Non, elle n’était pas réduite à la mendicité, et oui, il avait craint, quand Henri s’était blessé, d’avoir du mal à lui trouver un remplaçant. Abe ayant précisé qu’elle possédait un curriculum vitæ à toute épreuve et qu’il pourrait fournir d’excellentes références, c’était bien lui, Jackson Castle, qui se trouvait en mauvaise posture, et non cette jeune femme qui lui tenait si courageusement tête. Il n’ignorait pas que sa stature et son allure un peu rude en avaient impressionné plus d’un. Et pourtant, il la toisait sans vergogne.
Il esquissa un sourire.
— Vous pensez que je suis dans une situation désespérée, c’est ça ?
— Seulement si vous tenez à vos repas.
— J’ai la déplorable habitude d’en prendre plusieurs par jour…
— Et si vous voulez nourrir vos invités…
— Ils ont tendance à s’énerver quand on ne leur sert que de l’eau à table.
— C’est compréhensible. Ma grossesse ne posera pas de problème, monsieur Castle. Je sais me faire aider quand le besoin s’en fait sentir. Je ne compromettrai pas la santé de mon enfant et vous ne vous retrouverez pas avec un procès sur les bras, si c’est ce que vous craignez.
— Je vous prie de m’excuser si j’ai pu vous donner cette impression. Je remercierai Abe de vous avoir envoyée à moi.
— Vous m’acceptez donc ?
— De tout cœur.
— Vous mentez bien, monsieur Castle, mais c’est égal…
Pourquoi Jackson eut-il l’impression d’entendre flotter la suite dans l’air : « Ce ne sera ni la première ni la dernière fois qu’on me ment » ? De nouveau, elle porta une main protectrice à son ventre et son regard s’emplit d’une tension qu’il aurait voulu effacer.
— Puisque nous sommes d’accord, bienvenue chez moi, dit-il en lui tendant la main. Je compte passer environ trois semaines ici ; cela vous convient-il ?
Restait-il seulement trois semaines avant l’arrivée du bébé ?
Elle prit la main tendue en souriant et il sentit sa douce paume glisser contre la sienne.
— Ce sera parfait. Je prendrai garde à ne pas mettre mon enfant au monde en pleine réception et ferai de mon mieux pour satisfaire vos invités. Vous allez avoir des surprises !
Il espérait bien que non ; la surprise que représentait par elle-même Helena lui suffisait amplement. Déjà il ne pensait plus qu’au contact de sa main dans la sienne et il mourait d’envie de recommencer. Quelle histoire ! Parviendrait-il seulement à dissimuler l’attirance qu’il ressentait pour elle ?
Elle avait clairement précisé qu’elle n’accepterait pas d’avances ; ce n’était pas dans le profil de son poste.
Mais c’était définitivement dans la tête de Jackson

 
 

 

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chapitre 2

— J’ai enfin rencontré ce Jackson Castle pour qui tu travailles. Larges épaules, poitrine bombée, allure avantageuse. Il va faire de ta vie un enfer, Helena.
Levant les yeux de son panier, Helena croisa le regard d’Alma Frost. Alma, amie d’enfance qui tenait un magasin de fruits et légumes, était sortie sur le pas de sa porte dès qu’elle avait aperçu Helena devant son étalage.
Cette dernière sourit.
— Tu te trompes complètement, Alma. Le torse de Jackson Castle ne m’intéresse pas le moins du monde !
— Voilà qui serait nouveau ! Ce n’est pas parce que tu es enceinte que tu as cessé d’être une femme, j’imagine ? C’est un homme taillé pour l’amour.
Helena haussa les épaules.
— D’accord, c’est un bel homme, je te l’accorde.
Inutile d’essayer d’abuser la fine mouche qu’était Alma. Son instinct lui permettait de percer à jour les sentiments des gens. Cependant, Helena, qui n’était pas certaine de vouloir analyser ceux qu’elle portait à Jackson Castle, tenait encore moins à ce qu’une autre les dissèque. Le spécimen était certes magnifique, et il possédait un regard magnétique. En plongeant son regard dans cet océan gris, ce matin, Helena avait eu la sensation de se perdre dans un rêve aux couleurs de brume. Sous ses longs cils noirs, Jackson l’avait étudiée comme s’il connaissait son corps par cœur. Mieux valait garder ses distances avec un homme pareil ; rester de marbre, même si sa seule image la faisait bouillir.
— C’est curieux de penser qu’un homme aussi plaisant crée tant de tracas dans notre ville…
La remarque attira l’attention d’Helena. Elle cessa de choisir ses fruits pour dévisager Alma.
— De quoi parles-tu ?
Ce fut au tour d’Alma de hausser les épaules.
— Tu as certainement entendu parler d’une cérémonie prévue dans le parc dans trois semaines. Un énorme battage publicitaire destiné à célébrer la mémoire d’un feu Oliver Davis qui passait de temps à autre ses étés à Sloane’s Cove, il y a de ça vingt ans. Apparemment, ce monsieur connaissait beaucoup de gens qui tiennent à assister à l’événement. C’est pourquoi Sloane’s Cove et toutes les villes avoisinantes de Mount Desert Island sont prises d’assaut par de riches touristes essayant d’obtenir des chambres.
— C’est courant par ici en été.
— Jamais à ce point ! C’est comme si une volée de milliardaires s’abattait sur la région ! Et certains ne sont pas très aimables à ce qu’on raconte. Mais ce n’est pas tout. Ton M. Castle ne projette pas seulement d’organiser le concours de la plus grosse saucisse grillée. Aujourd’hui, il a rôdé un peu partout, posant toutes sortes de questions. Et pas des questions anodines, non, des questions personnelles. Il cherche à connaître des détails de la vie de certains habitants de Sloane’s Cove. Tu avoueras tout de même que ce n’est pas ordinaire…
Helena ajouta une pomme à son panier à demi plein. Elle comprenait Alma. Trois autres personnes lui avaient déjà fait part de leur perplexité. La curiosité de Jackson n’était pas blâmable en soi, mais, en général, les gens aisés qui gravitaient dans les parages ne remarquaient même pas les habitants du cru. Et s’ils les remarquaient, c’était en tant qu’éléments du décor, au même titre que les mouettes, les rochers ou les vagues qui venaient lécher la jetée.
— Il s’agit peut-être d’un écrivain ; à moins qu’il n’ait l’intention d’attirer l’attention de la presse sur les habitants du pays…, suggéra Helena.
— Tu crois ? demanda Alma en faisant bouffer ses cheveux.
Helena retint un sourire.
— Tu voudrais que je le torture pour le faire avouer ?
— Pourquoi pas si tu le déshabilles et me laisses regarder…
— Alma…
— Oh ! bon, d’accord. Je me demande seulement… Pourquoi ces questions si inhabituelles ?
— Peut-être est-il simplement d’un naturel curieux ?
Helena n’en croyait pas un mot. Malgré sa gentillesse, il lui apparaissait comme un homme qui garde ses distances et apprécie que les autres en fassent autant. Mais elle n’était sûre de rien. En réalité, ses frères avaient raison en affirmant qu’elle ignorait tout de lui et que sa naïveté lui avait déjà causé pas mal de déboires. A commencer par son mariage.
Après avoir rencontré des hommes avec qui elle n’avait aucun point commun, renonçant à l’amour, Helena avait décidé d’épouser, contre le gré de sa famille, un ami. Peter et elle étant tous deux désabusés, l’idée d’associer leurs solitudes lui avait paru bonne. Le marché était intéressant pour chacun d’entre eux : elle acquerrait une certaine expérience en matière culinaire tout en favorisant les relations professionnelles de son époux. Et, en effet, les dîners d’Helena avaient attiré de nombreux clients à Peter. Tout allait donc pour le mieux dans le meilleur des mondes jusqu’au jour où elle avait appris que Peter était tombé amoureux d’une autre. Elle aurait dû accepter de le laisser être enfin heureux, mais il avait fallu qu’elle s’accroche à lui. Elle avait fini par tomber enceinte. Deux mois plus tard, Peter mourait dans un accident en mer.
Alors, oui, elle ferait vraiment bien d’arrêter de foncer, tête baissée, dans les ennuis et de refréner la curiosité qu’elle éprouvait vis-à-vis de Jackson…
— Helena ?
Alma agita une main devant le visage de son amie. Brutalement tirée de ses pensées, cette dernière faillit renverser les pommes de son panier. Elle adressa un rapide sourire à son amie.
— A mon avis, Jackson pose toutes ces questions parce que son métier l’amène à s’intéresser aux artistes et artisans locaux, assura-t elle, se ressaisissant.0

D’un air incrédule, Alma leva la main pour arrêter Helena mais celle-ci s’entêta.
— Ne me crois pas, si tu veux ; moi, j’en ai la certitude. Après tout, il a bâti sa fortune sur la vente aux nantis de ce monde d’objets destinés à la décoration de leurs maisons, et la région regorge d’artisans. Il enquête probablement de la même façon partout où il se rend. Comment, sinon, dénicherait-il tous ces trésors cachés ? Oui, il profite de sa présence ici pour répertorier les talents locaux… Ecoute, si ça t’intéresse tellement, je peux poser la question à Jackson.
— Quelle question voulez-vous poser à Jackson ?
Le son de la grave voix virile fit tressaillit Helena. Elle se retourna brusquement et se heurta aux angles durs de la poitrine de Jackson.
Il la saisit par les bras afin de l’aider à reprendre son équilibre, et elle frémit au contact de ses doigts sur sa peau. Le temps parut s’arrêter. L’espace d’une seconde, elle éprouva la tentation de le supplier de la serrer dans ses bras protecteurs.
Mais Helena se ressaisit aussitôt. Après cette fameuse émission de télévision, Jackson devait crouler sous les avances de femmes prétendant au titre de future Mme Castle. Très peu pour elle ! Se réfugier dans l’ombre d’un protecteur ne l’intéressait pas ; tout au contraire, c’était toujours elle qui avait joué le rôle de meneuse dans le couple.
— Veuillez m’excuser ; je suis désolée, parvint-elle enfin à bredouiller.
— Ce n’est rien, voyons ! Je trouve seulement que vous ne devriez pas porter des charges aussi lourdes, dit-il d’un ton de reproche. Allons, donnez-moi ça !
Il chercha à s’emparer de son panier mais Helena résista.
— Pas question ! Je suis votre employée, c’est à moi de porter vos provisions ! De plus, ce panier est vraiment léger ; une fourmi le porterait !
— Ecoutez, vous êtes enceinte, ne l’oubliez pas. Permettez…
Et parce que sa voix sensuelle évoquait des chuchotements échangés dans l’intimité d’un lit, Helena permit.
— Que vouliez-vous me demander ?
Sa voix la faisait vibrer. Il ne l’avait pas lâchée et, à son contact, des frissons la parcouraient. Le trouble l’envahit et elle dut reprendre sa respiration.
Comme s’il prenait conscience de la retenir prisonnière, Jackson la lâcha. Puis il la regarda d’un air d’excuse.
— Alma voudrait connaître vos intentions au sujet de Sloane’s Cove.
Jackson plongea son regard dans celui d’Helena.
— Mes… intentions ?
Elle hocha lentement la tête, s’émerveillant de devoir ployer la nuque pour rester en contact avec son regard.
— Oui. Vous comprenez, riche comme vous l’êtes et fréquentant les grands de ce monde, il paraît peu probable que vous vous intéressiez à la population d’une petite ville… Et pourtant…
Il demeurait suspendu à ses lèvres, comme si ses propos revêtaient une importance extrême.
— Et pourtant ?
Helena toussota. En dépit de la chaleur qui irradiait en elle, elle ne capitula pas.
— Pourtant, vous semblez très avide de renseignements sur la vie locale…
— Des gens s’en sont plaints ?
— Bien sûr que non ! Ils sont flattés que vous parliez d’eux mais surpris qu’un homme de votre stature se préoccupe de leurs banales existences. Aux yeux d’un homme qui fréquente des endroits et des gens… exotiques, nous sommes tellement ordinaires.
— Il n’y a rien de mal à être ordinaire, Helena.
— Ce n’est pas très excitant, insista-t elle.
Il sourit.
— Vous regardez trop la télévision. M’imaginez-vous assez superficiel pour courir après le sensationnel ?
Elle le trouvait complexe, et dangereux. Et quand son regard tomba l’espace d’un instant sur ses lèvres, elle crut défaillir.
— Vous ne venez donc pas chercher de nouvelles expériences à Sloane’s Cove ? parvint-elle à demander.
Il secoua la tête.
— Je suis ici pour de multiples raisons dont aucune n’inclut le sensationnel. Il y a six mois maintenant, j’ai perdu un ami qui passait régulièrement des étés à Sloane’s Cove. Oliver Davis était un humaniste. C’est dans cette ville que, pour mon plus grand bien, nos chemins se sont croisés. Il m’a donc semblé judicieux d’y organiser une cérémonie commémorant sa mémoire.
Il s’échauffait en évoquant son ami ; et puis il se perdit dans le regard d’Helena comme s’il y cherchait des bribes de son passé.
— Ce devait être un homme extraordinaire, dit soudain Alma.
Helena, qui avait oublié sa présence, eut un sursaut. Et quand Jackson redressa les épaules et recula d’un pas, elle soupçonna que lui aussi avait oublié qu’ils n’étaient pas seuls.
— C’était un homme extraordinaire, dit-il, se tournant vers Alma.
Cette dernière lui tendit une main qu’il serra. En souriant, il examina le nom inscrit sur son badge.
— Madame Frost ? Seriez-vous la talentueuse et légendaire Mme Frost qui a gagné le concours de la meilleure confiture, trois étés consécutifs ?
Alma éclata de rire.
— Il ne faut pas écouter tout ce qu’on raconte, monsieur Castle ! En réalité, je dois mon succès à Helena. C’est elle qui m’a tout enseigné et elle m’a laissée gagner en ne participant pas aux concours. Helena est profondément bonne ; il n’est pas une cause qui ne lui tienne à cœur. J’ai eu le grand privilège de faire partie de ceux qui ont bénéficié de son aide.
Jackson se tourna vers Helena. Sous son intense regard gris, elle se sentit rougir.
— Abe ne m’a pas tout raconté, murmura-t il. Intéressant, vraiment intéressant.
— Pas aussi intéressant que ce qui vient, constata Alma. Les frères d’Helena ont dû avoir vent du fait que vous avez posé les mains sur elle, il y a moins d’une seconde
De la tête, elle désigna la rue d’où déboulait le groupe des frères Austin, la mine sévère.
Avec un gémissement, Helena saisit la main de Jackson.
— Venez !
Mais il ne bougea pas.
— Si vos frères veulent me parler, nous parlerons. Je ne m’y déroberai pas.
— Je ne me sens pas tranquille. Hier, ils se sont montrés polis, mais nous n’avions eu aucun contact physique, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui. Evidemment, ils ignorent que vous cherchiez juste à me rattraper. Seulement ils appartiennent à cette catégorie d’êtres humains qui cognent d’abord et s’expliquent ensuite. Je les ai désarçonnés en acceptant si abruptement votre proposition. De toute façon, depuis la mort de mon mari, ils passent leur temps à s’inquiéter sur mon sort.
— C’est leur devoir. Et je refuse de disparaître chaque fois qu’ils auront des comptes à me demander.
Derrière la massive silhouette de Jackson, Helena aperçut ses frères qui approchaient. Elle regarda Jackson d’un air implorant. Il paraissait tout aussi résolu qu’eux. Les deux camps semblaient décidés à faire parler leurs poings ; or, elle ne supportait pas l’idée qu’on se batte pour elle. Elle éprouvait déjà bien assez de remords de l’échec de son mariage.
— Jackson ? Emmenez-moi, je vous prie. Ce genre de conflit est néfaste pour le bébé.
Il poussa un juron étouffé.
— Où voulez-vous aller ?
Elle désigna une librairie située à trois portes de là.
— Là, c’est la boutique de ma sœur.
— Vos frères ne vous y suivront pas ? demanda Jackson en emboîtant le pas à Helena.
— Ils n’oseraient pas se battre devant Lilah.
— Il paraît qu’elle vous ressemble.
A cet instant, Lilah ouvrit la porte de sa boutique.
— Je dirais même que nous sommes exactement semblables, répondit Helena, jetant un coup d’œil par-dessus son épaule. C’est ma sœur jumelle.
Jackson hocha la tête.
— La ressemblance est frappante, je le reconnais. Cependant, certains détails vous distinguent. Par exemple, vos yeux possèdent des tons de bleu légèrement différents.
Helena écarquilla les yeux. Trop occupés à voir les ressemblances, la plupart des gens ignoraient des différences.
Cependant, Lilah leur faisait signe de se dépêcher d’entrer. Puis, refermant la porte derrière eux, elle s’y adossa.
— Bonjour, monsieur Castle, dit-elle en lui serrant la main. J’ai l’impression que vous avez déjà fait connaissance avec ma famille.
En voyant ses frères s’arrêter à sa porte, elle sourit.
— Je les ferai entrer d’ici à une minute, quand ils se seront calmés. Nous avons passé cet accord tacite entre nous, afin de protéger ma réputation au sein de la communauté. Ainsi, on sème la panique dans le clan Austin ?
— Il n’y est pour rien ! intervint Helena qui arpentait la pièce avec agitation.
Lilah examina Jackson de la tête aux pieds puis un lent sourire détendit ses lèvres. Elle s’approcha de sa sœur et chuchota à son oreille :
— Mais dis-moi, il a un charme fou !
Helena sentit ses joues devenir encore plus chaudes. Devant son expression, le sourire de Lilah s’élargit.
— Il fait chaud chez toi, dit Helena, s’emparant d’un magazine pour s’éventer.
C’était faux, mais par solidarité féminine, Lilah ne la contredit pas.
— Très heureux de vous rencontrer, mademoiselle Austin, dit brusquement Jackson. Puis-je vous confier Helena quelques instants ? Ne la laissez surtout pas s’épuiser à porter de lourdes charges.
— J’y veillerai, monsieur Castle.
— Où allez-vous ? s’enquit Helena.
— Parler à vos frères, évidemment.
— Ça peut être dangereux.
Devant le sourire de Jackson, la jeune femme comprit qu’il avait déjà affronté sa part de danger.
— Vous n’allez pas leur faire de mal ?
— Je n’ai pas pour habitude de frapper les membres de la famille de mes employées, répliqua-t il en ouvrant la porte.
L’instant d’après, il se retrouvait au milieu du groupe formé par les quatre frères.
— J’apprécie le soin que vous prenez de votre sœur, leur dit-il, mais vous devriez accepter qu’elle choisisse de travailler pour moi. En tant qu’employeur, je puis vous assurer que je veillerai à son bien-être. Ce qui signifie que je la rattraperai si elle manque de tomber, que je l’aiderai à s’asseoir si je juge qu’elle est restée trop longtemps debout, que je ne lui permettrai pas de porter de trop lourdes charges, et que je ne laisserai personne, pas même ses frères, être source de tension pour elle.
A la surprise d’Helena, ses frères le laissèrent poursuivre jusqu’au bout de son monologue. Alors, le silence s’établit. Leurs têtes se rapprochèrent ; il y eut des éclats de voix puis la discussion se calma. Finalement, ils se séparèrent.
— Nous acceptons vos explications, dit Frank. Surtout parce que nous savons à quel point Helena tient à sa carrière.
— Mais nous restons vigilants, ajouta Thomas.
— Il faut absolument que vous compreniez qu’elle est très différente des femmes que vous rencontrez à Paris.
En entendant Bill prononcer ces mots, Helena tendit l’oreille. Elle se demandait combien de liaisons parisiennes entretenait Jackson. En tout cas, il ne réfuta pas les propos de Bill.
— Et elle va se marier prochainement, conclut Hank.
Malgré ce qu’elle lui avait précédemment confié, sans ciller, Jackson se *******a de hocher la tête.
Helena se tourna vers sa sœur.
— Je voulais te dire, murmura Lilah, les garçons sont passés tout à l’heure. Ils estiment que, étant donné les circonstances, tu as porté assez longtemps le deuil de Peter. Thomas se mariant prochainement, nous demeurerons les deux dernières célibataires de la famille et l’idée les chiffonne. Ils aimeraient bien nous voir installées. Toi, d’abord, à cause du bébé, bien sûr.0
Helena se raidit.
— Il n’est pas question que je me remarie !
— Alors explique-leur vite ton point de vue ! Car ils passent déjà en revue les prétendants potentiels. Keith Garlan, Bob Mason… rien que des garçons charmants.
Avec un gémissement, Helena s’empara du bras de sa sœur.
— Je n’épouserai pas un de ces charmants messieurs choisis par nos frères ! J’imagine qu’ils ont dressé une liste de ce qu’ils appellent mes qualités et me présentent comme la panacée universelle. Malheureusement, j’ai connu assez d’hommes qui me considéraient comme la solution à leurs problèmes et qui ne savaient que faire de moi une fois ceux-ci résolus ! Vraiment, je crains de décevoir gravement nos frères.
— Je leur ai déjà expliqué, mais tu sais comment ils sont.
Elle savait.
— Merci, en tout cas, de me soutenir.
Helena adressa un sourire à sa sœur qui l’étreignit affectueusement.
— Tu es toujours là pour soutenir tout le monde, ce n’est que justice que tu reçoives à ton tour un peu de réconfort. Je suppose que, à ma façon, je ne suis pas meilleure qu’eux.
Toutes deux se retournèrent pour examiner les visages butés de leurs frères et Helena éclata de rire.
— J’en doute ! Enfin, s’ils se mettent en tête de te trouver un mari, je t’aiderai à échapper aux mailles du filet.
— Comme lorsque nous étions enfants, dit Lilah d’une voix attendrie. Tout le monde devrait avoir une sœur telle que toi. Ou même des frères comme eux. Au moins, nous savons qu’ils nous aiment.
« Exact », pensa Helena, observant le beau visage à l’expression déterminée de Jackson face à ses frères. On racontait dans l’émission télévisée qu’il n’avait aucune famille. Il était seul au monde.
Enfin, presque seul…
Sur une dernière étreinte et de nouveaux remerciements, Helena quitta sa sœur et gagna le trottoir. Jackson était sorti dans le but de l’aider mais elle tenait à lui prouver qu’elle n’était pas une fragile créature sans défense.
Si elle s’était réfugiée chez Lilah, c’était essentiellement pour se ressaisir, discipliner ses émotions face à Jackson. Ses frères n’avaient pas complètement tort : il représentait un danger.
Sauf que le problème n’était pas qu’il convoitât son corps comme ils l’imaginaient. Le problème était l’attirance qu’elle éprouvait pour lui. Jackson Castle était un séducteur. Il suffisait que son regard se pose sur son beau visage pour qu’elle éprouve le désir fou de se pencher et d’embrasser sa joue râpeuse. Ce qui, évidemment, ne lui apporterait que des ennuis. Une femme avec son passé devrait se montrer plus avisée…
Enfin, maintenant qu’elle admettait la réalité de son attirance, ce ne devrait pas être trop difficile de la contenir.
— Rentrons, dit-elle calmement. Vous devez mourir de faim.
Il posa sur elle un regard brûlant et, avec un frémissement de tout son être, elle pressentit qu’il ne se laisserait pas aisément oublier.
Il se tourna vers les quatre frères Austin.
— Je vous promets de veiller sur votre sœur, dit-il, mais n’oubliez pas que pendant les trois prochaines semaines elle m’appartient. Compris ?
Un fluide essentiellement masculin dut circuler entre eux car ils renoncèrent à leur attitude menaçante.
— Vous la protégerez ? demanda Thomas.
— Absolument.
— Et vous accepterez que nous ne renoncions pas à nos responsabilités ? ajouta Hank.
— Une femme dans la situation d’Helena a besoin d’une attention particulière, dit Jackson.
— Nous ne disparaîtrons pas ! prévint Frank.
— Elle a besoin des siens, concéda Jackson.
— Et n’oubliez pas ce que nous avons dit à propos de son mariage.
Jackson demeura quelques secondes silencieux.
— Je ne cherche pas une épouse, si c’est ce que vous insinuez, et je n’ai jamais exigé le célibat de mes employés, répliqua-t il paisiblement.
Helena ressentit un urgent besoin de piquer une colère, ce qui ne s’était pas produit depuis ses trois ans. Dominant toutefois son indignation, elle s’insinua dans le groupe des hommes.
— Veuillez m’excuser, mais en dépit de vos assertions, je suis parfaitement capable de prendre soin de moi-même !
Cependant, ni ses frères ni Jackson ne répondirent. Ils échangèrent simplement un regard entendu avant de se séparer.
— Je n’aime pas ça, dit-elle comme Jackson lui prenait la main.
Toutefois, la vérité était qu’elle aimait beaucoup la sensation de ses doigts sur sa paume. Beaucoup trop.
Deux préoccupations agitaient son esprit, pensait Jackson, un peu plus tard, tandis que, du fauteuil de la salle de séjour dans lequel il était installé, il regardait Helena virevolter autour de ses casseroles dans sa jolie robe jaune.
La première était qu’il avait appris en téléphonant à son bureau que Barrett Richards, son ancien associé, l’homme qui avait séduit sa femme, ayant eu vent de la cérémonie organisée à la mémoire d’Oliver, projetait d’y assister. A vrai dire, la nouvelle ne l’atteignait pas vraiment. La colère qui l’avait autrefois dévoré s’était muée en agacement.
Ce qui tourmentait beaucoup plus Jackson, c’était l’impression de ne pouvoir détacher ses pensées de sa nouvelle cuisinière ; comme le soleil qui pénétrait dans la cuisine ne se détachait pas de sa chevelure, la muant en une masse d’or en fusion…
Il ne voulait pas s’attacher à l’apparence d’Helena. Ni à la façon dont son long cou s’incurvait délicatement sur son épaule, ni à celle dont son tablier se nouant sous ses seins les soulignait d’une manière provocatrice, ni à celle dont elle posait la main sur l’endroit où se développait son enfant. Il voulait éviter autant que possible de se trouver en sa présence.0
Il se rappelait l’affection que lui prodiguaient son amie, sa sœur, ses frères, les sentiments de fidélité qu’elle leur inspirait, sa beauté, et il sentait qu’Helena Austin pénétrait en des zones intimes et depuis longtemps inexplorées de son être. Très jeune, il avait compris qu’il valait mieux éviter les émotions trop violentes et il s’était cramponné à cette théorie. A présent, après des années de pratique, il avait perdu la capacité d’éprouver des sentiments profonds ; sa femme le lui avait assez souvent répété.
Et pourtant, auprès d’Helena, il se sentait agité, impatient, troublé, ce qui était inacceptable. Il aurait probablement dû lui trouver une autre place. Si seulement il n’avait pas besoin de lui demander son aide, ce qui créait entre eux des liens encore plus complexes…
Cependant, son passage en ville aujourd’hui avait été instructif. Il avait appris que, alors qu’il souhaitait inspirer confiance, il avait au contraire attiré sur lui les soupçons. Cela, à cause de sa maladresse dans les relations humaines. Depuis longtemps, il avait pris l’habitude de consulter des experts dans les domaines où il pêchait. Et, dans le cas présent, il avait besoin d’un expert.
Il ne pouvait ignorer les raisons de sa venue à Sloane’s Cove. Il s’agissait bien sûr de saluer de façon grandiose la mémoire d’un homme qui s’était montré bon pour lui. Cette partie de ses projets avait été rendue publique, mais il restait une face cachée. Son idée était d’accorder, au nom posthume d’Oliver, une bourse à des gens dotés de talents divers que leurs modestes moyens ne permettaient pas d’exploiter. Bien que simple, la démarche réclamait une certaine discrétion. Comment déterminer qui avait le plus besoin d’aide, qui la méritait le plus ?
Et, tout brillant homme d’affaires qu’il fût, dans la circonstance présente, Jackson piétinait. En essayant de soutirer des informations aux gens, il avait troublé les eaux tranquilles de la petite ville, ce qui compliquait singulièrement sa tâche. Qu’il le veuille ou non, il avait besoin d’un allié dans la place, quelqu’un qui connaîtrait à fond les habitants de Sloane’s Cove.
Et la personne qui répondait à ses critères était là, juste sous ses yeux, resplendissante dans sa robe jaune et débordante de joie de vivre. Helena, qui était née à Sloane’s Cove. Helena qui, avec son grand cœur, défendait les causes perdues. Il avait une cause à défendre ; il lui fallait une femme comme elle, même si, en sa présence, ses paumes se mouillaient de sueur et ses sens vibraient de façon impardonnable.
Jackson réfléchissait. Tout en observant Helena par le passage qui séparait la salle de séjour de la cuisine, il eut la tentation de revenir sur sa décision. Se rapprocher d’Helena était trop risqué. Elle lui rappelait un monde de sensations auquel il n’appartenait plus. Un monde où étaient enfouis des souvenirs confus, violents, tendres et trop douloureux pour qu’il puisse envisager de les réveiller.
Et pourtant… il avait besoin d’Helena ; c’était la personne idéale pour le rôle.
Il se leva et se dirigea vers la cuisine.
A son entrée, Helena s’arrêta de chanter. Elle se retourna, un sourire flottant sur ses lèvres roses. Et devant ce sourire, il éprouva l’irrésistible envie de s’approcher. Ce qui aurait été une terrible erreur.
Etouffant un grognement de frustration, il parvint à sourire.
— Vous… désirez quelque chose ? demanda-t elle.
Oui, il désirait quelque chose. Mais il était parfaitement inutile qu’elle sache ce qu’il désirait d’elle puisqu’il ne s’autoriserait jamais à le lui demander.
— J’aimerais m’entretenir avec vous d’un sujet qui me tient à cœur. A propos, j’ai entendu dire que la marche était bénéfique à une femme dans votre situation…
— Ah ! oui, ma situation…, répliqua Helena en souriant.
— Marchez-vous ?
— Ça fait partie de mes multiples talents !
— Sortons, dans ce cas, dit-il en lui tendant la main. Et tout en nous promenant, je vous raconterai mon histoire

 
 

 

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chapitre 3

J’imagine que vous voulez m’entretenir de vos préférences culinaires ?
Bien qu’Helena s’efforçât d’adopter un ton professionnel, le regard intense de Jackson excitait dangereusement son imagination. Ses fantasmes ne se réaliseraient jamais, bien sûr. Elle était encore pire que ses frères en imaginant que Jackson avait posé sur elle un regard de loup affamé !
Afin de revenir à une plus juste vision des choses, elle posa une main sur son ventre. Dans son état, elle n’était pas près de susciter le désir d’un homme.
Jackson la guida vers l’escalier.
— Vous me posez la question, à moi qui ai dévoré trois de ces brownies confectionnés par vos soins ? demanda-t il en hochant la tête. Vous méconnaissez mes talents d’homme d’affaires, Helena. Quand je rencontre quelqu’un qui connaît son affaire, je n’interviens pas !
— Eh bien ?
S’immobilisant au bas des marches, Jackson se tourna vers la jeune femme. Le vent du large soulevait ses cheveux ; ses yeux se trouvaient au même niveau que les siens.
— Jusqu’à quel point connaissez-vous les habitants de Sloane’s Cove ? demanda-t il.
— J’ai vécu ici toute ma vie.
— Et vous ressentez de la sympathie pour vos concitoyens ?
Elle sourit.
— C’est plus que de la sympathie. A vivre au quotidien avec les gens, il se crée des liens spéciaux.
Comme il hochait la tête, Helena se demanda s’il avait connu ce genre d’intimité avec un lieu.
— Ainsi, si une bonne fortune échoit à certains habitants de cette ville, vous vous en réjouirez ?
— Naturellement. Mais je ne comprends pas…
— Eh bien, il y a des gens qui… enfin, qui méritent plus que d’autres le petit coup de pouce du destin. Vous en connaissez certainement quelques-uns.
— Je suppose, oui.
— Et si on vous disait que ces personnes peuvent être aidées ?
— Vous envisagez de jouer au Père Noël ?
— Je ne présenterais pas exactement les choses ainsi ! répliqua-t il en souriant.
Elle plongea son regard dans le sien et éprouva un vertige. Sa tête était lourde ; brusquement, ses membres refusaient de la porter.
— Comment présenteriez-vous donc les choses ?
— Je rembourse simplement une dette à l’homme qui m’a aidé au moment où j’en avais le plus besoin.
Elle le considéra quelques instants.
— Oliver était un homme bon.
— Il était plus que ça. Il m’a sorti du ruisseau et donné ma chance.
Helena fronça les sourcils.
— De quel ruisseau parlez-vous ? Vous n’avez pas vécu dans la misère à Sloane’s Cove, en tout cas.
— Non. Je n’y suis venu qu’une seule fois, avec ma mère et un… ami, quand j’avais douze ans. Elle et moi, mettons que… nous n’étions pas très proches. J’étais censé survivre par mes propres moyens, c’est ce que j’ai fait. En chemin, je suis tombé sur Oliver. C’est en lui volant ses clés que j’ai fait sa connaissance. Parce que, évidemment, il ne s’est pas laissé faire !
— Ne vous a-t il pas dénoncé à la police ?
Jackson sourit.
— C’était le cheminement normal, mais au lieu de ça, il m’a pris sous sa protection et m’a aidé à prendre un nouveau départ dans la vie en m’inscrivant dans un pensionnat anglais.
— Il vous a tenu lieu de père, dit-elle doucement.
— Oui. Et ça n’a pas été une tâche facile pour lui. J’étais indomptable.
— Mais vous ne l’êtes plus.
Comme il posait sur elle le regard de ses yeux gris, Helena comprit qu’elle s’était trompée. La violence était toujours là, elle couvait simplement sous la surface.
— J’étais à l’étranger quand Oliver est mort, reprit-il. Je n’ai même pas pu lui dire adieu. C’est pour réparer cette erreur que j’organise cette cérémonie. Et à cette occasion, j’offrirai à trois personnes la chance qu’il m’a offerte. Faire le bien en son nom, il est plus que temps, je crois.
Helena leva la tête pour l’observer. La gravité de son expression la frappa. Les mots ne lui venaient pas facilement. Bien que sa voix demeure égale, à des détails comme le cillement de ses paupières, elle devinait son malaise. Faire ses adieux à un ami n’est pas chose facile mais qu’il ait eu l’idée de transformer un événement profondément triste en une sorte de miracle pour certains de ses amis la touchait profondément.
Elle descendit la dernière marche et s’immobilisa à côté de Jackson. La chaleur du pavé gorgé de soleil traversait la semelle de ses chaussures.
— A quoi pensez-vous ? demanda Jackson tandis qu’ils se dirigeaient vers la plage parsemée de galets, où se mêlait l’odeur du pin et de l’iode.
— Je me demandais pourquoi vous me racontiez tout ça.
— Parce que vous connaissez les habitants de Sloane’s Cove. Je dois en apprendre le maximum sur eux, plus que je ne tirerais jamais de dossiers publics sans âme, plus que je n’obtiendrais en posant simplement des questions. Il faut que je sache comment ils fonctionnent, quelles sont leurs ambitions, leurs angoisses. J’ai besoin de quelqu’un qui m’aide à préciser tous ces détails sans révéler mes intentions.
— C’est une mission délicate.
En levant les yeux, elle découvrit le sourire de Jackson.
— Qu’y a-t il ?
— Alma dit que les missions délicates sont votre spécialité. Les justes causes vous intéressent, non ?
— Oui, bien sûr.
Jackson haussa les sourcils.
— Vous serez une mine de renseignements pour moi.
— Possible. Mais je ne saurai jamais choisir entre tous mes amis le plus méritant.
Il secoua la tête.
— Ce ne sera pas votre rôle. Je veux seulement que vous m’aidiez à voir les gens de Sloane’s Cove à travers votre regard. Ce sera une façon de les appréhender à laquelle je ne parviendrai jamais seul.0
— Vous envisagez réellement d’en aider certains ?
— Je pense faire tout un travail de réflexion à partir des talents, des ambitions et des besoins des gens afin d’être capable de révéler au cours de la cérémonie les noms des trois bénéficiaires du fonds Oliver Davis. Par ce biais, je continuerai ainsi son œuvre.
Se retournant, Helena se mit à marcher à reculons devant lui. Ses cheveux soulevés par le vent balayaient son visage.
— Et vous voudriez que je participe au projet ?
— J’espère de tout mon cœur que vous accepterez.
Comme il paraissait soudain hésitant, Helena se demanda pourquoi cet homme d’affaires brillant, fabuleusement riche et séduisant, pouvait imaginer un instant qu’on lui refuse quoi que ce soit. Pour une femme qui avait tendance à agir de manière irréfléchie, c’était cependant une voie dangereuse sur laquelle s’engager.
Elle lui sourit, puis, s’arrêtant, posa une main sur sa joue. Instantanément, son magnétisme la subjugua et elle se sentit perdre tous ses moyens.
— J’aimerais vous aider, Jackson, parvint-elle néanmoins à dire.
— Comprenez-vous que ça signifie passer plus de temps ensemble que nous ne l’envisagions ?
— Oui, je le suppose.
— Nous nous retrouverons forcément ensemble dans d’autres lieux. La cuisine ne nous séparera plus.
Elle déglutit.
— Je ne passe pas ma vie dans la cuisine.
Il sourit.
— Je veux seulement réitérer la promesse faite à vos frères. Quelles que soient les circonstances, votre bien-être passera avant tout. Je ne laisserai personne nuire ni à vous ni à votre bébé. Pas plus moi qu’un autre.
Sa voix avait baissé jusqu’au murmure.
— J’ai confiance en vous, murmura-t elle.
Avec un rire bas, il se remit à marcher.
— Parfait. Continuez ! Ainsi, j’aurai d’autant plus de scrupules à vous toucher.
Elle ouvrit grands les yeux.
— Voulez-vous répéter ?
— Vaut mieux pas. De toute façon, vous n’avez aucun souci à vous faire à ce sujet. Je pensais vraiment ce que j’ai dit à vos frères. Je voulais juste me montrer parfaitement honnête dans la mesure où je vous demande un service non compris dans le contrat.
Il la dévisagea.
— Vous êtes libre de revenir au projet initial ou même à aucun projet du tout.
— Et que deviendrez-vous sans complice et sans cuisinière ?
Il n’eut pas l’ombre d’une hésitation.
— Je survivrai. Je suis un homme riche et puissant, n’ayez aucune inquiétude à mon sujet.
Elle en avait pourtant. Ni l’argent ni la puissance ne permettent de tout acheter, et elle avait le sentiment que Jackson n’avait pas reçu grand-chose de la vie. C’était peut-être naïveté de sa part mais elle se demandait combien de gens resteraient à son côté quels que soient les risques encourus. Après tout, personne ne l’avait accompagné pour le soutenir dans son projet.
Elle se rapprocha.
— Je serai fière de vous seconder, Jackson.
L’espace d’un instant, elle sentit son regard sonder le sien comme s’il voulait s’assurer de sa sincérité. Un homme dans sa position devait souvent avoir affaire à des gens malhonnêtes, se dit-elle.
Finalement, Jackson se détendit.
— Nous serons donc associés dans cette aventure ?
Elle hocha la tête en souriant.
— Et ne vous faites aucun souci, je comprends que la discrétion soit de rigueur. Si les gens étaient au courant de vos intentions, ils ne seraient plus eux-mêmes. Comment allons-nous procéder ?
Il observa un moment les pêcheurs venus relever les casiers à homards.
— Je veux que vous me présentiez aux gens et me racontiez leur histoire. Pour cela, il faudra évidemment nous montrer davantage en public. Cela pose-t il problème ?
Elle hésita, ne sachant trop où il voulait en venir.
— A cause de vos frères, précisa-t il.
Helena eut envie de rire. Elle se rappelait les propos de Lilah, l’expression du visage de ses frères chaque fois que leur chemin croisait celui de Jackson. Serait-ce un problème d’être constamment vue en compagnie d’un homme fait pour les femmes comme le caviar pour le champagne ? Quel que soit le genre de pacte que ses frères semblaient avoir passé avec Jackson, ils accepteraient d’autant moins la situation qu’ils éprouvaient encore l’amertume de n’avoir pas su la préserver de sa malheureuse expérience avec Peter.
Mais Jackson n’était pas Peter.
— Tout ira bien, assura-t elle pourtant.
— En cas de problème, je prendrai tout sur moi, dit Jackson.
Sa voix profonde et chaude résonna délicieusement aux oreilles d’Helena. Elle aurait dû lui expliquer qu’il était trop tard, qu’il existait déjà des problèmes puisque le seul son de sa voix suffisait à la troubler.
D’un autre côté, « une femme avertie en vaut deux », se dit-elle. Il coulerait de l’eau sous les ponts avant qu’elle ne refasse la même erreur…
Elle ne devait pas perdre de vue le fait qu’elle était ici pour travailler, se disait Helena, le lendemain soir, en examinant la salle du Coveside Restaurant, lieu de sa première sortie publique avec Jackson. Elle avait suggéré ce restaurant parce que c’était un excellent poste d’observation doublé d’un endroit très agréable.
Se dressant en surplomb du rivage, le Coveside possédait une terrasse où l’on pouvait s’installer pour admirer la vue et respirer le bon air marin. On prenait ses repas sur des tables de bois usées par les intempéries et recouvertes de nappes à carreaux bleus et blancs. Des bouquets de narcisses les ornaient ainsi que de grosses bougies bleues.
Toutefois, si le restaurant était un lieu assez simple durant la journée, quand le coucher de soleil embrasait l’horizon de traînées de pourpre et d’écarlate, il devenait beaucoup plus romantique que dans son souvenir, constata Helena. Il ne restait plus qu’à espérer que Jackson ne partage pas cette impression et ne se demande pas dans quel but elle l’avait amené ici.0
— Ces fruits de mer étaient excellents, dit-elle en reposant son couvert d’argent sur son assiette vide.
Elle nota que Jackson n’avait rien laissé non plus dans son assiette.
Il sourit et haussa les sourcils.
— D’excellents fruits de mer dans le Maine ? Voyons, Helena, comment avez-vous déniché cet endroit ?
Son malaise dissipé comme par enchantement, elle éclata de rire.
— D’accord, d’accord ! C’était une remarque stupide. A mon crédit, il faut dire que vous n’êtes pas venu ici depuis vos douze ans et que vous regardez tout avec des yeux neufs. En ce qui concerne Sloane’s Cove, je suis comme une mère qui voudrait que tout le monde trouve son bébé merveilleux.
— Rassurez-vous, Helena. Votre bébé est merveilleux. Lors de mon dernier séjour, j’étais trop jeune pour remarquer le charme de la région mais à présent, je comprends pourquoi les gens choisissent de passer leur été dans le Maine.
— Et l’hiver ailleurs, précisa Helena.
Il la dévisagea.
— Comment est-ce en hiver ?
— Ma grand-mère disait que c’était un temps à faire pousser de la fourrure sur la poitrine des femmes !
— Il fait froid à ce point ?
— Pire encore ! Il souffle par bourrasques un vent glacial. La plupart des gens que j’ai connus enfant ont déménagé ; ils préfèrent passer l’hiver dans un lieu plus clément.
— Mais pas vous.
Elle fit saillir son menton.
— J’aime ma région.
Elle avait parlé un peu trop fort, comme sur la défensive. Jackson étudia son expression.
La culpabilité envahit Helena. Il n’était là que pour quelques semaines, pour accomplir une bonne action, et n’était certainement pas responsable de ceux qui l’avaient laissée derrière eux ni du mari qui l’avait abandonnée.
— Désolée, dit-elle d’un ton penaud.
— De quoi donc ? D’aimer votre ville ? Il ne faut pas. Même si je suis incapable de m’attacher à une personne ou à un lieu, je ne critiquerai jamais votre fidélité. Je la trouve rafraîchissante.
— Vous étiez pourtant attaché à Oliver.
— On est forcément reconnaissant à qui vous sauve la vie.
La remarque avait spontanément jailli, comme s’il n’éprouvait aucun sentiment pour celui qui lui avait tendu la main. Cette froideur surprit Helena qui songeait que sa présence en ce lieu démontrait au contraire qu’il possédait un cœur d’or. Il souffrait probablement encore de la mort d’Oliver, éprouvait peut-être même de la rancune. Elle se rappelait très bien sa propre rancœur à la mort de ses parents.
Tout en sachant qu’elle risquait gros en le touchant, Helena avança une main à travers la table et la posa sur celle de Jackson.
— Vous l’aimiez, dit-elle simplement.
Il la dévisagea.
— Je ne suis pas l’homme des sentiments profonds, Helena.
Ces paroles tenaient lieu d’avertissement, elle en était persuadée. Elle aurait été bien avisée de s’en tenir là mais demeurait persuadée qu’il avait aimé Oliver. Sinon, pourquoi se donnerait-il tant de peine pour honorer sa mémoire alors qu’il était tellement occupé par ailleurs ?
— Oliver vous a aidé, insista-t elle. Et quand les gens auront compris ce que vous faites pour eux, ils vous seront reconnaissants, ajouta-t elle, utilisant ses propres termes.
A son contact, Jackson tressaillit. Il plongea son regard dans le sien et secoua lentement la tête.
— Je ne quémande pas de reconnaissance. Tout le mérite de cette action revient à Oliver. Ne vous imaginez pas que je lui ressemble en aucune manière. Dès que cette affaire sera réglée, je retournerai à mes affaires.
Il lui suggérait explicitement de garder ses distances. Cependant, Helena se demandait comment un homme comme Jackson, qui voyageait constamment et rencontrait sans cesse de nouvelles têtes, pouvait se sentir aussi solitaire. Elle savait si peu de lui ; seulement qu’il avait été rejeté par une mère insensible. A cette pensée, elle ferma les yeux, comme si elle pouvait par ce simple geste protéger la vie qui grandissait en elle.
— Jackson ! Ça alors, je me demandais quand je tomberais sur toi !
Levant les yeux, Helena découvrit derrière l’épaule de Jackson un homme au visage angélique, auréolé de cheveux blonds et bouclés. Le sourire suffisant qui distendait ses lèvres démentait cependant cette image.
Jackson ne se retourna pas.
— Bonjour, Barrett, répondit-il froidement. Que fais-tu à Sloane’s Cove ?
Le nouveau venu éclata de rire, puis, s’approchant, sourit largement à Helena.
— Est-il besoin de le préciser ? C’est assommant. Enfin, si tu veux savoir, j’accompagne Emil Ramsey, à la fois client et meilleur ami. Il était aussi ton client autrefois, si je me souviens bien.
— Comme c’est intéressant.
Le dénommé Barrett eut un rire désagréable.
— Quelle froideur, mon pauvre Jackson ! J’ai toujours pensé que sous cette enveloppe dont les femmes raffolent, tu cachais un cœur de pierre. C’est à se demander ce qu’a été ton enfance…
Jackson se *******a de le dévisager. Finalement, Barrett haussa les épaules.
— D’accord, je suis là parce que j’ai entendu parler d’un afflux de gens aisés dans la région et que je ne peux m’empêcher de penser au magnifique terrain de prospection que cela offre pour les affaires. Tous ces membres de l’élite n’ayant d’autres soucis que de dépenser leur argent ! Une vraie mine d’or pour moi. D’autre part, Emil tient à assister à ta cérémonie. Il est persuadé que des gens importants seront présents. Et tu sais comment est Emil ; il aime qu’on le remarque. A ce que j’ai compris, ajouta-t il avec un sourire mauvais, il n’y a pas besoin de carton d’invitation pour y assister.00
— C’est ouvert au public, Barrett. Tu peux dire à Emil que je ne le jetterai pas dehors si c’est ce que tu veux savoir.
— Formidable. Ce serait désastreux pour mes affaires, tu sais.
Jackson ne cilla pas.
— Nous ne voudrions pas retarder ton dîner, dit-il sur un ton qui mettait fin à l’entretien.
— Ne me présenteras-tu donc pas à cette charmante jeune femme qui t’accompagne, à moins que tu ne désires la garder pour toi ?
— Et pourquoi voudrais-je la garder pour moi ?
— Parce que je suis ton rival, Jackson, que je t’irrite et que tu voudrais me voir disparaître de la surface de la terre !
Jackson leva une main.
— Je n’entrerai pas dans ce genre de discussion avec toi, Barrett.
— Et je ne me retirerai pas juste parce que tu le souhaites. C’est si amusant de te contrarier ; tu es toujours tellement maître de toi. Et cependant… tu étais le préféré d’Oliver.
Jackson s’agita sur son siège.
— Au revoir, Barrett.
Ce dernier lui tourna le dos mais pour reporter son attention sur Helena à qui il adressa un sourire qui dévoilait toutes ses dents.
— Permettez-moi de me présenter : Barrett Richards. Jackson se montre toujours possessif avec ses femmes, ajouta-t il sur un ton de confidence.
Il prit la main d’Helena, glissant avec une insistance un peu trop appuyée ses doigts sur sa paume.
Très embarrassée, la jeune femme eut un sourire crispé.
— Helena Austin. Je travaille pour M. Castle.
L’homme haussa les sourcils.
— Continue comme ça, et tu pourras dire adieu à ces dents qui t’ont coûté si cher, intervint sèchement Jackson. Mlle Austin est une excellente cuisinière.
Barrett adressa à la jeune femme un paresseux sourire.
— J’aurais dû me mettre sur les rangs, dit-il en portant la main d’Helena à ses lèvres. Il se trouve que je suis grand connaisseur en bonne chère et en jolies femmes. Malheureusement, ma cuisinière est passable et c’est un homme de surcroît. Peut-être pourrions-nous nous rencontrer prochainement pour discuter de tout cela…
Sous le regard moqueur de Barrett, Helena éprouva un enfantin besoin de lui arracher sa main. Toutefois, n’osant pas, elle se *******a de hocher la tête.
— Au revoir, Jackson, dit en ricanant Barrett. Je suis sûr que nous nous reverrons. Peut-être même nous retrouverons-nous sur le même terrain. J’aime les affrontements, surtout avec un adversaire à ma taille. Ton seul défaut, c’est d’être aussi peu partageur.
Sur ces mots, il se pencha vers Helena et déposa un baiser sur sa main, le plus naturellement du monde.
— Au revoir, mademoiselle Austin. J’ai été ravi de faire votre connaissance et j’attends avec impatience de vous revoir, sans chaperon, cette fois.
Et, sur un clin d’œil, il s’éloigna.
Après son départ, un lourd silence s’abattit sur les deux convives.
— Eh bien, ça ne s’est pas si mal passé, finit par dire Helena. Il n’y a pas eu d’épanchements de sang.
Les longs cils de Jackson battirent et il posa sur elle son beau regard gris.
— Vous êtes adorable, Helena.
— Désolée, ça ne me regarde pas, je sais, mais pourquoi cet homme vous déteste-t il autant ?
Un masque descendit sur le visage de Jackson.
— Ça remonte à l’époque de mes vingt-trois ans. Barrett était un jeune opportuniste qui voulait conquérir une place dans le monde des affaires. Ayant entendu mentionner la générosité d’Oliver, il fit de son mieux pour entrer dans ses bonnes grâces. Cependant, Oliver savait juger les individus et il a résisté aux tentatives de Barrett pour lui extorquer de l’argent. Cependant, comme il croyait à la nécessité de donner aux gens une seconde chance, il m’a envoyé Barrett pour que je lui donne du travail. Mais ça n’a pas marché comme il l’espérait.
Il lui prit la main.
— Ne vous inquiétez pas, Helena. Barrett ne nous causera aucun souci.
— Tout de même, dans une aussi petite ville, vous n’allez pas cesser de vous croiser…
Avec un haussement d’épaules, Jackson demanda l’addition. Après l’avoir réglée, il prit le bras d’Helena et la guida vers la plage toute proche.
— Nous ne sommes pas venus à Sloane’s Cove pour les mêmes raisons, reprit-il. Ça n’a donc aucune importance.
— Que va-t il se passer ?
— Je n’entrerai pas en compétition avec lui, si c’est ce que vous voulez savoir. Une fois ma tâche accomplie, je plierai bagages. Je ne m’attarde jamais dans un lieu où rien ne me retient.
Ces mots, il donnait l’impression de les avoir prononcés à maintes reprises, ce qui était certainement le cas… chaque fois qu’une femme s’attachait un peu trop à lui à son goût. Et Helena se demanda s’ils représentaient une mise en garde. Elle n’en avait pourtant nul besoin. A présent qu’elle était responsable d’une autre vie, elle n’avait pas le droit d’agir inconsidérément. D’ailleurs, elle était sur ses gardes depuis qu’une sonnette d’alarme avait résonné dans sa tête quand elle avait découvert, la veille au matin un Jackson, torse nu, les yeux embués de sommeil, debout dans une flaque de soleil.
Combien de femmes s’étaient éveillées près de lui, avaient repoussé ses cheveux de ses yeux et lui avaient donné un baiser plein d’amour pour recevoir en retour un regard qui signifiait : « Je ne veux pas te faire de mal, mais… » ? Beaucoup trop probablement. Par chance, elle ne ferait pas partie du lot.
Helena tenta de sourire d’un air détaché tandis que Jackson l’aidait à s’asseoir sur un rocher accueillant.
— Vous passez donc sans cesse d’une activité à l’autre ? Est-ce ce qui vous a valu votre succès ?00
Il écarta les mains en signe d’assentiment.
— C’est toujours un défi de trouver le bon objet pour le bon client. Presque un jeu, parfois. N’avez-vous pas cette impression quand vous trouvez l’ingrédient miracle pour confectionner une recette très spéciale qui satisfera les goûts d’un client ?
— C’est vrai, dit Helena, comprenant qu’il ressentait lui aussi le frisson du chasseur d’or découvrant un filon.
Puis, incapable de résister plus longtemps à la curiosité, elle renchérit :
— Mais que vient faire Barrett dans tout cela ? On dirait qu’il cherche à vous provoquer.
Jackson détourna son regard vers les vagues.
— Barrett est une vraie mouche du coche, dit-il finalement. Oui, il est mon concurrent et un concurrent plutôt heureux. Il livre ce qu’il a promis. Cependant, comme il ne prend pas le temps d’étudier la personnalité du client, en général, la satisfaction de ce dernier est de courte durée. Il prospecte également des terrains qui ne m’intéressent pas. Vous n’avez donc pas à vous soucier de lui.
Il sembla à Helena que ces derniers mots contenaient un sens caché allant au-delà d’une préoccupation purement professionnelle. Et quand il changea rapidement de sujet et la complimenta sur le choix du restaurant, elle fut presque certaine qu’il s’efforçait de la distraire.
— Parlez-moi de cet homme, demanda-t il en désignant de la tête un dîneur d’un certain âge qui occupait une table avec vue sur la mer et buvait tasse de café sur tasse de café.
— Est-ce ainsi que nous allons procéder ? s’enquit-elle en riant. Je vais vous présenter les uns après les autres les habitants de Sloane’s Cove ?
— Il faudra trouver un moyen plus rapide, concéda-t il, sinon j’aurai une barbe grise d’ici que nous ayons terminé ! Non, nous étudierons des listes mais ça ne peut pas nous faire de mal de nous exercer quand nous croisons des gens. Cette réponse vous convient-elle ?
— C’est vous le chef, répondit-elle d’un ton léger.
— Mais je dépends de vos gracieuses mains, Helena.
Le son velouté de sa voix arracha un frisson à la jeune femme.
— Dans ce cas, allons-y ! Il s’agit d’Elliott Woodford, un ancien pêcheur devenu enseignant. Depuis qu’il est à la retraite, il dirige un musée d’histoire. C’est un veuf. Toutes les femmes en raffolent mais il a décrété que son épouse avait emporté son cœur au paradis et qu’il ne se remarierait jamais.
— Quelle tristesse…
— En réalité, il s’occupe et est heureux de penser qu’elle l’attend.
— Je présume qu’il n’a pas besoin de mon aide.
— Pas vraiment. Ce qui n’empêche pas que vous vous rencontriez. Je suis sûre que vous vous apprécieriez. Vous avez beaucoup en commun.
— Une certaine solitude ?
— Oui. Et vous savez aussi tous les deux ce que vous attendez de la vie.
— Vous ne savez pas ce que vous voulez ?
Elle le dévisagea quelques instants en silence.
— Si, bien sûr. Je veux vivre à Sloane’s Cove, faire profiter mes concitoyens de mes talents culinaires, écrire des livres de cuisine et élever mon enfant. Et, à ce sujet, je suis une solitaire moi aussi.
— Plus pour longtemps, souligna-t il en regardant son abdomen.
— Vous avez raison.
— Vous pourriez vous apercevoir que vous n’avez pas envie d’élever seule votre enfant.
— Je… Ça m’étonnerait, répliqua-t elle un peu trop vite.
Comme Jackson posait sur elle un regard interrogateur, Helena espéra qu’elle ne changerait pas d’avis. Parce que le seul homme à qui elle portait de l’intérêt en ce moment, c’était justement lui.0

 
 

 

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chapitre 4

Dire qu’il avait été assez stupide pour suggérer à Helena qu’elle pourrait avoir besoin d’un homme ! s’insurgeait Jackson, allongé dans son lit, bras croisés derrière la tête. Il l’avait perturbée, et c’était bien normal. En s’immisçant dans sa vie privée, il avait outrepassé son rôle d’employeur.
Il n’en connaissait pas moins le pourquoi de cette maladresse. En la voyant assise devant lui, si belle, si pure, l’idée qu’elle tombe entre les pattes de Barrett Richards l’avait révolté. Car ce dernier tenterait de la séduire ; c’était aussi sûr que deux et deux font quatre. Et le fait qu’Helena n’apprécie pas le personnage ne rassurait pas du tout Jackson. Barrett connaissait l’art de faire changer les femmes d’avis. C’était un charmeur, un caméléon capable d’endosser de multiples personnalités, et il était si fort à ce petit jeu qu’il devait parfois s’y laisser prendre.
Oui, Barrett ne manquerait pas de la poursuivre de ses assiduités et Jackson ne pourrait faire autrement que s’efforcer de la protéger ; ce qui rendrait leurs relations d’autant plus complexes…
Déjà qu’il avait du mal à résister à la tentation de caresser ses beaux cheveux ou de lui prendre le bras pour la soutenir quand elle traversait une pièce. S’il devait passer davantage de temps avec elle, où puiserait-il la force de nier son attirance ?
Cette remarque avait été destinée à lui rappeler qu’il devait s’en tenir à l’écart ; une façon de se rafraîchir la mémoire, en quelque sorte. Ce qui ne faisait pas taire son désir de l’embrasser. En y réfléchissant, au fond, il n’était pas meilleur que Barrett.
Ce fut sa première pensée quand il s’éveilla le lendemain matin avec le bruit de la sonnerie de la porte d’entrée qui résonnait dans sa tête. Dans la cuisine, il découvrit Helena qui tentait désespérément de jongler avec ses casseroles pour aller ouvrir sans laisser brûler le petit déjeuner.
— J’y vais, Helena.
Un sourire radieux le récompensa. Le cœur joyeux, il se dirigea vers la porte pour découvrir un adonis aux yeux bleus, aux cheveux blond doré soulevés par la brise, vêtu d’un T-shirt dépourvu de manches qui révélait des épaules et des bras d’athlète.
Le nouveau venu adressa à Jackson un sourire plein d’assurance.
— Helena est-elle là ?
Jackson haussa les sourcils.
— Seriez-vous un nouveau frère Austin ?
— Pas du tout ! Mon nom est Keith. Je passais simplement la voir. Elle me connaît bien, ajouta-t il d’un ton qui sous-entendait qu’elle serait ravie de le voir.
Une sensation déplaisante noua la poitrine de Jackson, sensation sur laquelle il préféra ne pas s’appesantir. Avec un hochement de tête, il introduisit le jeune homme dans la salle de séjour puis se dirigea vers la cuisine.
— Un certain Keith désire vous voir, annonça-t il. Dois-je le faire entrer ?
— Keith ? Pas Keith Garlan, tout de même ?
— Cela, ma chère, je l’ignore, répondit Jackson d’une voix qu’il s’efforçait de contrôler. C’est un jeune homme blond aux yeux bleus qui possède une musculature d’athlète. Il semble penser que vous mourez d’envie de recevoir sa visite.
Brusquement contrariée, Helena s’essuya les mains à son tablier blanc brodé de bleuets et de coquelicots. C’était un grand tablier, qui dissimulait en partie sa silhouette, mais que, pour une mystérieuse raison, Jackson trouvait irrésistiblement affriolant. Couvrant la courbe haute des seins, ce tablier lui donnait l’envie de glisser ses bras autour de sa taille et de dénouer les cordons afin de révéler les tendres formes. Et soudain, l’idée que de semblables pensées pourraient traverser l’esprit de Keith le mit hors de lui.
— Je reviens, dit-elle, le front barré d’une petite ride.
Elle posa sur la table un plat de crêpes accompagnées de sirop d’érable ainsi qu’une cruche de jus d’orange et du café.
— Mangez, je vous en prie.
Elle s’essuya de nouveau les mains à son tablier, forçant une fois de plus l’attention de Jackson sur ses seins et il perdit instantanément l’appétit. Devant son expression, Helena se rembrunit.
— Désolée, je ne devrais pas recevoir de visites chez vous. Je vais lui demander de se retirer.
Instantanément, Jackson s’en voulut de lui causer une contrariété quand elle avait tant besoin de sérénité.
— Allons, Helena, cela ne me gêne pas du tout que vous receviez des visites.
— Dans ce cas, asseyez-vous.
Cependant, au lieu d’obéir, il glissa ses bras autour de sa taille. Un parfum enivrant de vanille, d’érable et de douce chair de femme monta à ses narines. Malgré son désir de le respirer plus à fond, il se *******a de dénouer les cordons de son tablier et de le lui retirer. Dans sa robe jaune paille, elle demeurait tout aussi séduisante mais, du moins, son tablier n’exciterait pas les fantasmes de l’arrogant mâle qui attendait dans la salle de séjour.
— Vous n’allez pas accueillir votre visiteur en tenue de travail, expliqua-t il d’une voix légèrement étranglée.
Elle poussa un bref soupir et rosit délicieusement. Délibérément, Jackson se força à s’asseoir.
— Vous voyez, je suis installé… Allez-y.
Elle jeta un coup d’œil à son tablier déposé sur le dossier d’une chaise comme si elle avait l’intention de s’en revêtir mais ne le ramassa pas.
Jackson ferma les yeux. Il se demandait quel épouvantable péché il avait commis dans une vie antérieure pour mériter pareil tourment. Mais en réalité, il savait que ce qui le hantait, c’était une jeune femme aux cheveux blond vénitien qui faisait partie de son présent
Comme il mordait dans la meilleure crêpe qu’il ait jamais goûtée, il souhaita qu’Helena soit plus âgée ou moins attirante ; car dans ce cas, il aurait beaucoup mieux apprécié sa nourriture. Au lieu de ça, il allait se torturer les méninges à se demander qui pouvait bien être ce Keith et ce qu’il voulait à Helena.
Helena quitta précipitamment la pièce. L’espace d’un instant, enveloppée de la chaleur des bras de Jackson, elle avait craint de commettre un acte inconsidéré, comme se jeter dans ses bras, lui demander de l’embrasser ou s’évanouir.
A présent toutefois, elle devait se reprendre. Elle ne connaissait qu’une raison possible à la présence de Keith Garlan dans cette maison, et cette raison la contrariait profondément.
— Bonjour ! dit-il comme elle pénétrait dans la salle de séjour. Bill m’a dit que je te trouverais ici.
« Ce bon vieux Bill », pensa Helena, vouant son frère aux gémonies.
Elle adressa un faible sourire à Keith.
— Tu voulais me voir ?
Il haussa les épaules.
— Je veux toujours te voir, Helena. Tu le sais. Mais en l’occurrence, je tenais à te dire que tes frères n’apprécient guère que tu passes autant de temps avec lui, expliqua-t il avec un signe de la tête en direction de la cuisine. Il a la réputation de consommer les femmes comme d’autres la bière. Ecoute, Helena, tu dois penser à ton enfant. Il te faut quelqu’un de confiance sur qui te reposer. Quelqu’un d’ici.
— Merci de te préoccuper de mon sort, Keith, répliqua froidement Helena, mais tu n’as aucun souci à te faire au sujet de M. Castle. Je suis son employée ; il ne s’intéresse pas le moins du monde à moi.
— C’est sans doute pour ça qu’il m’a regardé de si haut. Il ne semblait pas apprécier que nous puissions avoir des projets.
— Mais nous n’en avons pas !
— Pourquoi pas ? Je t’ai toujours beaucoup aimée, Helena.
Cette dernière soupira. Keith était un garçon charmant mais ce qu’il cherchait, c’était une gentille petite femme toute dévouée à lui. Et Helena n’avait plus envie de se dévouer à personne. De toute façon, elle aimait bien Keith, rien de plus. Cependant, pour l’heure, elle ne se sentait pas le courage de mettre les choses au clair.
— En ce moment, je n’ai aucune envie de sortir avec quiconque, Keith. Tu ferais aussi bien d’aller le dire à Bill.
— Et si je te faisais changer d’avis ?
Tandis qu’il avançait d’un pas, Helena recula. Comme s’il avait entendu sa prière muette, Jackson parut dans l’encadrement de la porte.
— Si vous me présentiez à votre ami, Helena ?
Une vague de gratitude submergea la jeune femme. Cependant, comme elle ouvrait la bouche, Keith leva une main.
— Nous nous sommes déjà rencontrés. D’ailleurs, je dois me rendre à mon travail. J’attendrai, Helena, ajouta-t il à l’intention de la jeune femme. Crois-moi, je suis l’homme de la situation. J’aimerai ton enfant comme le mien, et tu ne seras pas sans cesse comparée à d’autres.
Sur cette flèche, avec un regard lourd de sous-entendus à l’intention de Jackson, Keith se dirigea vers la porte. Quand sa voiture se fut éloignée, Jackson se tourna vers Helena.
— Sans doute devrais-je vous présenter des excuses ?
Elle secoua la tête en souriant.
— Mes frères veulent à tout prix me marier et j’ai l’intuition que Keith n’est que le premier d’une longue liste de prétendants ! Je leur dirai le fond de ma pensée mais sans grand espoir d’être entendue. Les Austin sont terriblement entêtés et mes frères semblent convaincus que vous nourrissez de sombres desseins à mon égard. C’est stupide. Je m’efforcerai de les convaincre du contraire.
Tout en parlant, elle s’était rapprochée de lui et l’intensité de son regard exprimait sa contrariété d’introduire une nouvelle complication dans sa vie.
— Je leur parlerai aujourd’hui, promit-elle.
Doucement, il glissa une main sur sa taille et l’attira à lui.
— N’en faites rien, murmura-t il. Il se pourrait qu’ils aient raison.
Quand il posa ses lèvres sur les siennes, elle perçut le goût sucré du sirop d’érable. Avec avidité, la bouche de Jackson réclama la sienne. Elle sentait sa grande main dans son dos qui la maintenait serrée contre lui tandis qu’il l’embrassait encore et encore.
Et puis, il recula d’un pas et elle se retrouva brutalement privée de son appui. Comme elle chancelait, il l’aida à reprendre son équilibre.
— Toutes mes excuses, dit-il d’une voix rauque. Vous voyez : je suis capable de vous traiter sans le respect dû à une employée. C’est terrible, avec vous, j’ai tendance à me montrer… imprévisible. A l’avenir, j’essaierai de me contrôler et de ne pas me mêler de vos affaires.
A cet instant, Helena éprouva une profonde compassion pour Jackson. On aurait dit que l’envie d’assommer quelqu’un le démangeait ; et elle avait la conviction que c’était lui-même qu’il aurait voulu punir. Si seulement elle avait pu abolir ces dernières minutes et revenir au temps où elle ignorait la saveur des baisers de Jackson Castle, elle ne languirait pas qu’il recommence, et lui cesserait de s’en vouloir.
— Vous êtes chez vous, vous n’avez aucun motif de vous excuser.
Sous le regard des yeux gris qui la sondaient jusqu’au fond de l’âme, elle se remémora la chaleur de son étreinte et le goût de ses lèvres. Puis elle baissa les yeux sur son ventre et secoua la tête.
— Je… je… ne suis pas sûre de comprendre.
— Il n’y a rien à comprendre. Vous êtes infiniment désirable et je ne suis qu’un homme.
Elle ne put retenir un sourire.0
— Vos préoccupations affectent votre jugement. Voyons, regardez-moi, Jackson ! Je suis enceinte, et pas loin du terme !
Un sourire répondit au sien.
— Regardez-vous vous-même ! Vous êtes la tentation personnifiée, Helena. Et je suis tenté au-delà de toute raison. Seulement, rien n’est possible entre nous ; vous êtes… enfin, vous êtes enceinte ; une aventure de passage est certainement la dernière chose que vous souhaitez.
Ces paroles causèrent à la jeune femme une souffrance sur laquelle elle refusa de s’attarder.
— Je ne souhaite rien dans ce domaine, affirma-t elle.
— Ça risque de devenir un problème.
Elle suivit la direction du regard de Jackson. Un nouveau véhicule s’engageait dans l’allée ; en reconnaissant son conducteur, elle étouffa un gémissement.
— Bob Mason, murmura-t elle. Cette fois, c’est un coup de Frank.
— Désirez-vous que je reste ?
Elle faillit accepter son offre ; elle avait tellement besoin de lui, de ses bras autour d’elle, de l’impression qu’il lui donnait d’être désirable, ce qu’elle n’avait pas ressenti depuis longtemps. Mais il avait raison. Rien n’était possible entre eux.
— Merci, c’est inutile.
Elle remarqua néanmoins qu’il ne s’éloignait pas complètement. Aux fourmillements qui traversaient tout son corps, elle devinait sa présence. La pensée que Jackson était tout proche lui procura une vive émotion et son cœur se mit à battre la chamade.00

 
 

 

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