le 9éme chapitre
Le soulagement envahit la jeune femme. Elle se pressa contre son compagnon, nichant sa tête au creux de son épaule. Les bras de Sean se resserrèrent autour d’elle. Ses lèvres effleurèrent ses cheveux.
— Je suis enfin au port, murmura-t-elle.
— Oui, répondit-il d’une voix voilée.
Il déplaça l’un de ses bras pour mieux l’attirer contre lui, et leur intimité s’accrut tandis que leurs corps se moulaient l’un contre l’autre.
— C’est un point de non retour, Anne.
— Je sais.
Sean dévora le cou de sa compagne de longs baisers ardents. Elle glissa une main dans l’encolure entrouverte du peignoir, écarta les deux pans de tissu. Sous ses doigts, la peau de Sean était ferme, douce et brûlante. Elle posa les lèvres au creux de sa gorge, là où battait une artère bleutée.
Il émit un murmure rauque. D’un mouvement rapide, il releva le visage d’Anne et sa bouche s’abattit sur la sienne, avide et persuasive, exigeante. Elle céda à l’emportement de ses sens, à la tension qui l’habitait avec une force grandissante, à son excitation. Accueillant avec transport les caresses passionnées de Sean, elle laissa elle aussi courir les mains sur son corps viril, heureuse de pouvoir l’aimer librement, enfin.
Sentant son excitation, elle se mit à bouger sensuellement contre lui, soulevée par un vertige agréable, acceptant avec ivresse de s’oublier elle-même dans ce dialogue d’amant à amante où régnaient les sensations.
Soudain, Sean se détacha d’elle à demi pour la soulever entre ses bras. Il la porta ainsi tout autour des lieux, s’arrêtant çà et là pour lui demander d’éteindre une lumière. Et tandis qu’elle tendait le bras vers l’interrupteur qu’il lui indiquait, il l’embrassait profondément, passionnément, prolongeant parfois le baiser jusqu’à la prochaine halte, ou s’attardant pour démultiplier la sensualité de leurs échanges. Lorsqu’elle eut pressé le dernier bouton de lampe, l’obscurité les enveloppa, les plongeant dans un monde secret et clos, intensément intime. Elle crut que Sean allait s’abattre sur le lit avec elle, mais au lieu de cela, il la remit debout, sans pour autant interrompre son baiser.
Leurs corps vacillèrent l’un contre l’autre, trouvant presque aussitôt leur équilibre, et elle le sentit trembler. Elle se cramponna à lui, le caressant doucement pour l’apaiser, mais il laissa échapper un long gémissement de désir et l’embrassa avec une passion dévastatrice. Jamais elle n’avait rien éprouvé d’aussi intense et d’aussi merveilleux. S’arrachant à demi à la pression de ses lèvres, elle souffla d’une voix rauque :
— Je te veux, Sean. Maintenant.
Murmurant un refus, il poussa un long soupir, secoua la tête. Elle devina qu’il tendait un bras, dans le noir. Soudain, dans un chuintement, les rideaux de la baie vitrée s’ouvrirent derrière elle.
— Je veux que tu aies tout, Anne, dit-il doucement. Tout ce qu’il est en mon pouvoir de te donner.
Il lui fit faire volte-face pour lui permettre de contempler le port, les lumières de la ville, leurs reflets miroitant sur l’eau. L’enlaçant par la taille, il l’attira doucement contre lui. Il avait ôté son peignoir et, à travers ses vêtements, elle perçut la nudité de Sean.
— Le mystère de la nuit, reprit-il à voix basse, tout en effleurant la nuque et les cheveux de la jeune femme avec ses lèvres. Ephémère et recelant pourtant les profondeurs cachées et insondables de l’éternité. Et nous sommes là, ensemble, vivants et tièdes, défiant la solitude de ces espaces infinis et froids.
Les mains de Sean se refermèrent sur les seins d’Anne.
— La terre n’a rien de plus beau à offrir, dit-il.
Intuitivement, Anne devina qu’il ne parlait pas de la nuit, mais de ce qu’ils partageaient l’un et l’autre — l’un avec l’autre.
Il saisit ensemble les pans du pull en cachemire et du caraco de soie qu’elle portait et les releva, les faisant glisser pour les ôter et les abandonner au sol. De nouveau, il l’attira à lui, pressant son torse contre le dos nu d’Anne, reprenant possession de ses seins libérés de la gangue du tissu.
D’un geste instinctif, elle posa les mains sur celles de Sean comme pour mieux les retenir contre son cœur, tandis qu’il posait avidement les lèvres sur la courbe de ses épaules, et qu’elle oscillait de côté et d’autre, s’abandonnant au plaisir d’une pluie de baisers. Puis, d’un geste rapide et preste, il défit la fermeture à glissière du pantalon en velours, lui dénudant les hanches.
Elle ôta ses chaussures, se libéra des vêtements échoués à terre et demeura tremblante, offerte, tandis que Sean caressait sa chair dénudée. Soudain, il l’enlaça et leur union fut plus intime encore, éveillant en elle des sensations étourdissantes.
Il y avait quelque chose d’intensément primitif dans ce dialogue nocturne de deux corps nus enlacés, unis dans un monde à eux, et portant cependant leurs regards vers le monde du dehors, où s’agitaient doucement les vagues du port, où des lumières brillaient pour d’autres, où s’accrochaient des étoiles dans un ciel enténébré.
Anne eut envie de voir le visage de Sean. Comme s’il avait deviné ce qu’elle désirait, il la fit pivoter face à lui, la tenant à bout de bras pour qu’ils puissent se contempler. Elle put entrevoir son regard intense concentré sur elle, comme s’il cherchait à jauger ce qu’elle était pour lui.
— Sean…, murmura-t-elle dans un élan de désir.
— Tout va bien, répondit-il. Je veux graver la magie de cet instant dans ma mémoire, pour toujours. Capturer et retenir ce que tu es dans ta vérité de femme