CHAPITRE 6
Jenna s’éveilla d’un bond. Elle était toujours habillée. Néanmoins, elle avait tiré la couverture sur elle durant la nuit et au moins n’avait?elle pas attrapé froid. Elle re-garda l’heure au réveil, sur la table de nuit, et s’aperçut qu’il était 4 heures du matin. Son horloge interne sem-blait décidément réglée sur l’heure de New York.
Elle s’endormit et s’éveilla de nouveau. Il était 6 heures. Rejetant les couvertures, elle se rappela qu’elle s’était endormie alors qu’elle devait juste attendre que Sam aille se coucher. Elle se jura qu’aujourd’hui, elle ne se laisserait pas distraire de son but. Mince ! Elle n’était pas plus avancée que le jour où elle était arrivée au ranch, et n’avait toujours aucune idée de l’endroit où Sam avait pu installer le bureau de sa grand-mère.
Elle s’étira et entreprit de faire glisser le zip de sa robe, qui, malheureusement, resta coincé. Elle eut beau s’y essayer plusieurs fois, rien n’y fit.
Espérant que Maria passerait par là, elle se dirigea vers la porte, traversa le couloir et aperçut Sam qui sor-tait de sa chambre. Lorsqu’il la vit, il fronça les sourcils. Mortifiée, elle ferma les yeux un instant.
— Jenna ?
— Pourrais-tu… ?
Ses paroles moururent sur ses lèvres.
— Pourrais-je… quoi ? demanda-t?il en s’approchant, l’air intrigué.
Elle se tourna et ferma les yeux. Même à travers ses vêtements, elle pouvait sentir la chaleur de sa peau. Inspirant légèrement, elle perçut son parfum musqué. Elle ressentait son désir, comme s’il était le sien. Et elle avait envie de lui, comme cela ne lui était jamais arrivé auparavant, avec aucun homme. Tout ce qu’elle voulait, c’était se fondre en lui et voir où cela les mènerait. Mais elle ne pouvait pas, non. Surtout pas maintenant. Elle avait besoin d’être seule, afin d’explorer la maison. Si elle l’entraînait dans sa chambre, qui savait combien de temps ils passeraient ensemble. En ce qui la concernait, elle aurait volontiers passé la journée entière avec lui, au lit.
Elle entendit son souffle chaud contre son oreille.
— Qu’est-ce que tu veux, Jenna ? Dis-le-moi, chu-chota-t?il.
— Pourrais-tu m’aider à détacher cette robe ? deman-da-t?elle d’une voix rauque. Je me suis endormie tout habillée et à présent la fermeture Eclair est coincée.
— Bien sûr. C’est tout ce que tu veux ?
Il prit la tirette de la fermeture entre ses doigts et commença à la faire glisser doucement, écartant le tissu. Ses doigts effleurèrent sa peau. Elle frissonna et sentit la chaleur de son corps contre son dos, comme la caresse d’une flamme. Il descendit le zip jusqu’en bas, tout en laissant courir ses doigts contre sa peau. Ses mains étaient faites pour caresser le corps d’une femme, son-gea-t?elle.
— Oui, c’est tout ce dont j’ai besoin… pour l’instant, répondit?elle.
Un désir pressant s’insinua en elle. Sam se pressa tout contre ses fesses et elle sentit son sexe dur dans le creux de ses reins.
Il prit ses longs cheveux dans une main et les fit tom-ber de côté, révélant sa nuque, puis elle sentit la chaleur de ses lèvres dans son cou et des vagues de feu se pro-pagèrent en elle. Tout était parfait. Elle le voulait, le désirait tant. Ses lèvres glissèrent jusqu’à son épaule et embrassèrent sa peau nue.
Il glissa une main sur sa taille et elle enlaça ses doigts.
— Je ne t’ai pas dit, hier soir, à quel point tu avais magnifiquement joué.
— Merci, dit?elle en dénouant ses doigts.
Sam retira sa main, puis se mit à lui caresser les che-veux.
— Est-ce que… tu pars travailler aux écuries ? de-manda-t?elle.
— Oui, je dois ranger le grenier à foin, et j’en ai pour un bon moment. Cet après-midi j’ai rendez-vous avec le comité de soutien de l’hôpital.
Il s’interrompit un instant, semblant peser ses mots.
— Aimerais-tu m’accompagner ?
Le ton séducteur de sa voix lui donnait envie d’acquiescer à tout ce qu’il disait. Elle inspira profon-dément, tandis que la joie s’insinuait en elle. Son ab-sence lui laisserait suffisamment de temps pour ses re-cherches.
— Eh bien, on dirait que tu vas être occupé toute la journée. J’ai bien peur qu’il en soit de même pour moi. J’ai rendez-vous à 13 heures avec l’académie de musi-que et une répétition à 15 heures. Et puis, il faut que je m’exerce.
Elle regarda ses mains, cherchant désespérément à en faire quelque chose, avant de les caresser.
Puis, sans même s’excuser, elle s’enfuit. La façon dont elle s’éloignait de lui était incompréhensible. Elle lui jeta un dernier coup d’œil et ferma sa porte.
Etait-ce parce qu’elle avait réellement besoin de cette matinée pour se mettre en chasse ou bien parce que Sam la troublait profondément, plus qu’aucun homme n’en avait jamais été capable ? En sa présence, elle perdait tout contrôle d’elle-même, et son cœur battait la cha-made.
A moins que ce ne fût la raison, qui l’avait fait s’éloigner de lui.
Non, certainement pas. Une femme à l’esprit pragma-tique aurait su se retirer de façon plus élégante.
Mais les lâches, eux, savent quand il faut courir et battre en retraite, et c’était ainsi qu’elle venait de se conduire. Elle retira sa robe et ses bas et se réfugia dans la salle de bains, avant de céder à une impulsion insen-sée, telle qu’ouvrir sa porte, attraper Sam par le cou et l’entraîner sur son lit pour assouvir leur désir.
Elle se glissa sous le jet de la douche et l’eau chaude commença à la relaxer. Elle était déterminée à découvrir le bureau dès ce matin et à y récupérer le fameux carnet. Ensuite, elle pourrait se rendre à ses rendez-vous de l’après-midi, satisfaite d’avoir accompli les derniers vœux de sa grand-mère.
Soudain, elle se sentit coupable. Elle avait à peine pensé à son aïeule, ces dernières vingt-quatre heures. D’aussi loin qu’elle se souvienne, sa grand-mère avait toujours été à ses côtés, et l’avait toujours soutenue, dans tout ce qu’elle avait entrepris. Tandis que sa propre mère, ne faisait qu’apparaître et disparaître dans sa vie. Jamais elle n’avait pu se débarrasser de la déception qu’elle lui avait causée. Cela n’avait pas été évident, pour une petite fille de cinq ans, de comprendre un com-portement aussi égoïste, mais depuis lors elle s’était fait à cette idée, et avait compris que l’amour et la passion de la musique ne faisaient pas bon ménage. L’un des deux devait s’effacer devant l’autre. Il en avait été de même pour sa grand-mère, qui avait renoncé à sa car-rière pour l’amour de son époux. Elle les aimait telle-ment tous les deux, son grand-père et elle, qu’elle re-merciait chaque jour sa grand-mère d’avoir fait ce sacri-fice et de lui avoir offert un foyer si chaleureux.
Pour sa part, elle n’avait aucune intention de laisser ses sentiments interférer dans sa carrière, qui était à son apogée. Jenna comptait bien rester au sommet aussi longtemps que possible. La musique était un univers sûr, sécurisant, qu’elle comprenait bien mieux que ces sensa-tions étourdissantes qui lui faisaient perdre tout contrôle sur elle-même.
Lorsqu’elle ouvrit la porte de sa chambre, pour la se-conde fois de la matinée, tout était calme dans la maison. Sam travaillait dans la grange, et il était encore tôt. Elle jeta un coup d’œil devant la porte de sa chambre, se de-mandant si le bureau pouvait s’y trouver. Inspirant pro-fondément, elle traversa le couloir et tourna la poignée. La porte s’ouvrit sans un bruit.
A pas de loup, elle entra dans la pièce. Ses yeux se posèrent sur les meubles de cèdre massif, puis sur le grand lit recouvert d’un édredon aux couleurs vives, la table de nuit et la commode. Un confortable fauteuil était installé près de la fenêtre, de laquelle on pouvait observer les pâturages dans lesquels on menait paître les bêtes.
Aucune trace de bureau. Pourtant, elle ne pouvait se résoudre à sortir.
Jenna marcha jusqu’à la commode et regarda ce qui s’y trouvait posé : une vieille montre d’homme, un badge en forme d’étoile et quelques pièces de monnaie. La montre en argent retint son attention. Elle s’en saisit ; elle avait vu suffisamment d’antiquités dans sa vie, pour savoir qu’il s’agissait d’une montre ancienne de valeur. Soulevant la chaîne, elle poussa le remontoir et la pla-que avant s’ouvrit, révélant un message gravé.
« A mon mari bien-aimé, Silas, avec tout mon amour.
Savannah. »
L’inscription, si personnelle, lui rappela qu’elle était en train de fouiller dans l’intimité de Sam. Honteuse de ce qu’elle était en train de faire, mais incapable de s’arrêter, elle referma délicatement la montre.
Ensuite, elle prit l’étoile, qu’elle reconnut aussitôt comme un insigne de l’équipe des Rangers. En l’approchant tout près de ses yeux, elle y vit l’inscription de la compagnie d’élite à laquelle Sam avait appartenu. Eh bien, tous deux avaient un riche héritage, lui avec ses ancêtres et son appartenance au Rangers, et elle avec le scandaleux carnet de sa grand-mère, sur lequel elle devait mettre la main.
Peut-être un homme tel que Sam comprendrait?il si elle se *******ait de lui expliquer quelle importance les écrits de sa grand-mère avaient pour elle. Sauf qu’elle comptait toujours sur la possibilité qu’un juge recon-naisse l’illégalité de la vente et demande la restitution de tous les meubles ainsi que des objets qu’ils contenaient. Mais pouvait?elle prendre un tel risque ?
Elle s’approcha du lit et imagina le corps de Sam al-longé, au milieu des draps et des oreillers. A cette idée, son pouls s’accéléra. Elle caressa d’une main le porte-manteau qui se trouvait dans un coin. Il était sculpté dans des cornes de bétail, et diverses ceintures et échar-pes, ainsi que la chemise blanche qu’il portait la veille au concert y étaient accrochées. Elle s’approcha et porta le vêtement à son nez. Elle avait l’habitude des eaux de toilette coûteuses, mais Sam n’en portait pas. Il n’avait besoin d’aucun parfum artificiel. Inspirant profondé-ment, elle huma la chemise, respirant l’odeur naturelle de Sam.
Elle ferma les yeux et se délecta de la senteur, qui ne ressemblait à aucune autre et embaumait le cuir, le vent et le savon.
La porte d’entrée claqua et elle entendit des pas tra-verser le hall et grimper les escaliers. Prestement, elle raccrocha la chemise et se dirigea vers la porte. Elle était juste sur le seuil, lorsque Maria arriva en haut des marches.
Jenna fit un pas en avant. Honteuse, elle avait du mal à croire qu’elle avait ainsi fouillé dans les effets person-nels de Sam et le rouge lui monta aux joues.
— Si vous cherchez Sam, dit Maria, il est dans la grange, je l’ai aperçu lorsque j’ai déposé Caleb il y a environ vingt minutes. Je suis très en retard sur mon planning, à cause de ce Tooter qui n’arrête pas de jacas-ser. Pourriez-vous dire à Sam que le petit déjeuner sera servi dans un instant ?
Jenna sourit, essayant de calmer les battements de son cœur.
— Oui, bien sûr, Maria. Merci.
Elle se dirigea vers l’escalier, tandis que Maria péné-trait dans la chambre de Sam. Elle la vit prendre le linge sale pour le laver et soupira. Apparemment, Maria ne s’interrogeait pas sur la raison de sa présence dans l’antre de Sam, et ne songeait qu’à son travail.
A mi-chemin de la grange, Jenna commença à se sen-tir nerveuse ; elle avait l’impression d’avoir dévoilé l’âme de Sam. La montre et l’étoile de Ranger révélaient déjà tant de choses sur lui qu’elle avait envie d’en savoir encore bien davantage.
— Sam ? Tu es là ?
Au-dessus d’elle, le parquet grinça et un peu de paille et de poussière tombèrent à ses pieds.
Lorsqu’il apparut, il était nu jusqu’à la taille, un ban-dana bleu noué seul autour de son cou. Ses cheveux sombres n’étaient pas attachés et descendaient dans son cou, moites de sueur.
Il avait son Stetson noir sur la tête (certainement pour empêcher ses cheveux de lui tomber sur le visage), et l’avant était tellement enfoncé que ses yeux demeuraient dans l’ombre.
Tout ce qu’elle voyait, c’était ses joues et son men-ton, ce qui mettait encore plus en valeur le dessin de ses lèvres. Quant à ses mains, elles étaient protégées par d’épais gants de cuir.
Les mots ne parvenaient pas à sortir de sa bouche. Elle était troublée par l’allure de Sam et ne parvenait qu’à le regarder fixement. Elle suivit le mouvement des gouttes de transpiration qui roulaient sur son torse, glis-saient de son ventre musclé jusqu’à la ceinture de son jean. Elle se lécha les lèvres, sentant presque le goût salé de son corps sous sa langue.
Il s’approcha d’elle.
— Eh bien ? Que se passe-t?il ? Tu as perdu ta lan-gue ?
Elle regarda son jean qui le moulait de façon si étroite, et se souvint de la puissance de ses cuisses, lors-qu’il s’était serré contre elle, la nuit précédente.
— Non, j’ai juste un peu de poussière dans l’œil, ré-pondit?elle d’une voix rauque.
Elle ne pouvait le quitter des yeux ; les muscles de sa poitrine l’hypnotisaient.
Il hésita. Les yeux sombres de Jenna semblaient bril-ler dans la semi-obscurité de la grange.
Il posa ses mains sur le plancher du grenier. D’un bond, il se laissa habilement choir sur le foin entassé à côté de Jenna et se remit rapidement sur pied.
Il s’approcha d’elle, et comme la veille, elle eut l’impression de sentir la chaleur irradier de son corps, mêlée à son odeur musquée.
Il retira ses gants et s’approcha tout près.
— Laisse-moi regarder cette poussière.
Rangeant ses gants dans la poche arrière de son jean, il se tint tout contre elle. Instinctivement, cherchant son équilibre, elle posa les mains sur son torse, et sentit son pouls s’accélérer lorsqu’il plongea son regard dans le sien. Il posa les mains sur son visage et elle se sentit tressaillir.
— Du calme, murmura-t?il d’une voix basse et rau-que, dont il usait certainement pour calmer les chevaux.
Ses mains étaient rugueuses et abîmées par les tra-vaux du ranch. Comment pouvaient?elles en même temps être si douces ?
Jenna s’abandonna à la caresse de sa main, à la cha-leur de son souffle sur son front qui faisait voleter les petits cheveux autour de son visage.
Sam fronça les sourcils.
— Tout m’a l’air normal. Est-ce que par hasard tu me raconterais des histoires ?
Elle déglutit, essayant de trouver rapidement une ex-cuse, sachant que cela lui serait impossible, alors qu’il se tenait si près d’elle et la troublait tant.
— D’accord, je l’avoue, j’ai menti. En fait, j’étais un peu troublée par ta… tenue. On ne voit pas souvent des hommes se balader ainsi, aussi peu vêtus, à New York.
— Ma tenue ? Oh… je vois. Aurais-je par hasard heurté ta sensibilité ?
— Non.
— Donc ça ne te dérange pas ?
— Non.
— Si, ça te perturbe.
— Non, pas vraiment… je… Sam, tu me troubles.
Elle ferma les yeux un instant, essayant de se repren-dre.
Sam sourit.
— Tu préfères peut-être que je mette une chemise ?
— Non… enfin, si.
Il se colla contre elle.
— Alors, que veux-tu dire ? C’est oui, ou non ?
— Tu m’énerves ! Ton corps ne me trouble pas plus que ça, sache-le ! En fait, je suis venue ici parce que j’ai pensé que tu avais peut-être faim et pour te dire que Maria était sur le point de servir le petit déjeuner.
— Hm, ce n’est pas cette faim-là qui me dévore, Jen-na, mais plutôt celle qui s’empare de moi, chaque fois que tu me regardes, comme tu es en train de le faire !
Soudain, elle se sentit prise au piège.
— Sam, à quoi joues-tu ?
Ses mots moururent sur ses lèvres, alors que Sam la prenait par la taille et la tenait serrée tout contre lui.
— Chérie, je ne joue pas.
Sa bouche se posa sur la sienne et elle sentit l’urgence de son désir.
Ses lèvres étaient chaudes et douces comme du ve-lours et elle gémit de plaisir en les sentant se poser sur les siennes. En cet instant, peu lui importaient ses doutes et les conséquences de leurs gestes.
Elle glissa ses bras autour de son cou, jetant au pas-sage son Stetson par terre. Ses mains se posèrent sur sa nuque et elle caressa ses cheveux, doux comme de la soie.
Sam gémit et l’embrassa plus profondément, sa lan-gue fouillant sa bouche comme une flamme brûlante.
Puis, soudain, il s’écarta d’elle. Il ferma les yeux et elle lut sur son visage, l’effort qu’il faisait pour ne pas se laisser aller aux pulsions de son corps.
Elle lui caressa le visage. Il ouvrit les yeux et la vul-nérabilité qu’elle découvrit en lui la toucha. Cette fa-cette de sa personnalité l’effrayait presque. Elle se sen-tait nettement plus à l’aise lorsqu’il exerçait sur elle son charme de cow-boy macho.
Cette partie de lui, si sensible, qui s’offrait à elle, lui faisait peur et en même temps l’excitait, elle devait bien le reconnaître.
Pendant une longue minute, il l’observa. Puis il leva doucement la main vers elle, et de son pouce, caressa ses lèvres. Jenna gémit et se sentit défaillir tandis qu’il continuait cette caresse si intime.
— Tu l’as déjà fait dans le foin ? chuchota-t?il.
Prenant son visage entre ses mains, il commença à l’embrasser doucement, caressant ses lèvres des siennes. Des frissons la parcoururent, lorsqu’elle sentit sa langue s’immiscer en elle.
— Maintenant, chérie ? Si nous le faisions mainte-nant ?
Elle n’eut pas le temps de lui répondre. Déjà, il l’embrassait de nouveau, caressait ses cheveux. Elle lisait le désir dans ses yeux.
Soudain, son baiser se fit plus exigeant, plus profond et elle sentit des vagues de chaleur monter en elle. Ja-mais elle n’avait connu un feu aussi brûlant. Toute résis-tance l’abandonna, et elle se cambra contre lui, appelant ses caresses de tout son corps.
Lorsqu’elle sentit ses mains se poser sur ses seins, elle sut qu’elle était en train de vivre ce dont sa grand-mère parlait dans son journal intime.
La passion.
Alors elle comprit que si elle ne s’y abandonnait pas, elle prenait le risque de ne jamais la connaître.
Sam la serra un peu plus contre lui, et leurs regards se croisèrent, éperdus.
— Sam ?
La voix de Tooter résonna dans la grange.
— Bon sang, murmura Sam sans répondre à son contremaître. J’ai bien peur que nous devions remettre nos petits jeux dans le foin à plus tard.
Il s’écarta d’elle, prit ses gants dans sa poche et les enfila, profitant de ce bref moment pour reprendre contenance. Jenna essaya d’en faire de même, mais tout ce dont elle avait envie était de poser de nouveau ses mains sur lui, et de poursuivre leurs caresses.
— Rentre à la maison, lui dit?il. Je serai là bientôt. Dis à Maria qu’elle pourra servir dans environ une demi-heure. Tu pourras tenir jusque-là ?
— Pour le petit déjeuner, peut-être, pour le reste, je ne sais pas, répondit?elle en passant devant lui.
Lorsqu’elle aperçut Tooter, elle lui sourit, mais le vieil homme se *******a de lui jeter un coup d’œil. Elle s’arrêta et le regarda, intriguée. Et soudain : elle com-prit. Tooter avait fait exprès de les interrompre. Elle se demanda ce qu’il avait contre elle. Lorsqu’elle aurait un moment, elle en parlerait à Sam. Elle était habituée à entretenir de bonnes relations avec son entourage, de même qu’avec son public et cela l’ennuyait qu’il n’en soit pas de même avec le vieil homme.
— Sam ?
— Je suis là, Tooter.
Lorsque son contremaître s’approcha de lui, Sam avait repris toute son assurance.
— Que se passe-t?il ?
— Le gars qui livre la nourriture du bétail est là.
— Tooter, pourquoi est-ce que tu viens me parler de ça ?
— Je pensais que tu aimerais être au courant.
Sam le regarda droit dans les yeux, l’air furieux.
— C’est curieux, parce que depuis que tu as commen-cé à travailler au ranch, ce qui remonte à quoi, oh, di-sons, seulement une bonne vingtaine d’années, tu t’es toujours occupé de l’alimentation des animaux sans même m’en toucher un mot !
Tooter rougit et contempla le bout de ses chaussures, avant de relever les yeux sur lui, l’air frustré. Il semblait avoir un énorme poids sur la poitrine.
— Est-ce que tout ceci n’aurait pas plutôt pour but de nous séparer, Mlle Sinclair et moi ?
Tooter se renfrogna.
— Elle n’est pas faite pour toi, Sam. Tu te laisses complètement mener par tes hormones. Elle est exacte-ment comme ton ex-femme.
Sam se sentit bouillir intérieurement, sachant que Tooter n’avait pas entièrement tort. Jenna avait de nom-breux points communs avec Tiffany, mais en cet instant, il n’en avait cure. Il avait envie d’elle.
— Ce que je fais ou ne fais pas avec Mlle Sinclair ne regarde que moi. Je n’ai pas besoin que tu te mêles de ça, Tooter. *******e-toi de faire le boulot pour lequel je te paie !
Sa rage diminua aussitôt en découvrant la peine sur le visage du vieil homme. Il se pencha et ramassa son cha-peau par terre, passa vivement sa main dans ses cheveux et remit son Stetson sur sa tête.
— Ecoute, je suis désolé de t’avoir parlé ainsi, c’était injuste. Néanmoins, ce que j’essaie de te dire c’est que je suis adulte et que je sais pertinemment ce que je suis en train de faire.
— Vraiment ? Je n’en suis pas si sûr. J’ai bien vu la façon dont tu la regardais, hier, lorsque je suis venu te parler de Silver Shadow. Je ne suis peut-être plus très jeune, mais je ne suis pas aveugle.
— N’essaie pas de me dire comment mener ma vie, Tooter. J’apprécie ton opinion et je la respecte, mais pas dans ce domaine.
Tooter lui opposa un sourire moqueur.
— Tu brûles de désir pour elle, mais elle, tout ce qu’elle fera, c’est te briser le cœur.
— Tout ceci n’est que temporaire, et s’arrêtera dès qu’elle quittera le ranch.
— Ce qui ne sera jamais assez tôt, en ce qui me concerne. Dès que je l’ai vue, j’ai su qu’elle allait t’attirer des problèmes.
Tooter se retourna et quitta la grange, grommelant à propos de la stupidité des hommes et de leur libido. Et Sam se disait qu’il n’avait peut-être pas tort.
Il frappa du poing dans sa main et regagna rapidement l’étage du grenier. Il pouvait encore sentir la main de Jenna caresser son visage, et se remémorer la façon dont elle l’avait regardé. Ses doigts étaient longs et gracieux, faits pour jouer de la musique et tirer de sublimes notes d’un instrument précieux. Mais lui avait envie de goûter à ces doigts, de jouer avec eux. Il voulait les sentir sur sa peau. Il voulait vibrer à l’unisson avec Jenna, si fort qu’il en oublierait tout. Qui il était, et qui elle était.
Même s’il le savait parfaitement.
Tooter avait raison. Jenna n’appartenait pas à son monde. Elle appartenait à New York, une ville où les hommes gardaient leurs vêtements en public. Une ville où les magnifiques gratte-ciels se découpaient sur un horizon sublime et où les voitures n’avançaient pas. Un endroit où la sophistication et l’élégance faisaient partie du quotidien. Pas un endroit où l’on trouvait en perma-nence de la poussière, de la boue, du foin et de la sueur.
Plus tard, Tooter pourrait dire qu’il l’avait bien pré-venu.
Mais seulement, bien plus tard !