CHAPITRE 9
— Que veux-tu dire exactement ? s’enquit son grand-père à l’autre bout du fil d’un ton impatienté. Que tu viens accompagné ?
— Oui, tu m’as bien compris, répondit Brice.
Loin de s’attendre à ce que son grand-père fît des difficultés, il avait néanmoins estimé légitime — avant de proposer officiellement une date à Sabina — d’informer celui-ci qu’il lui rendrait visite le week-end suivant… en compagnie féminine.
— Mon château n’est pas un hôtel, mon garçon, maugréa Hugh McDonald. Je sais que toi et tes cousins n’y pensez jamais, mais figurez-vous que moi aussi j’ai ma propre vie. Et je ne me morfonds pas dans mes donjons en attendant que vous daigniez me rendre visite.
Oh oh… Son grand-père était de fort mauvaise humeur, aujourd’hui ! Brice était bien conscient que la propriété requérait beaucoup de travail. Les hectares entourant le château étaient dévolus essentiellement à l’élevage, et même si le domaine était tenu par plusieurs métayers, Hugh tenait malgré tout à superviser l’ensemble.
Soudain, il l’entendit préciser :
— En outre, il est possible que je reçoive moi-même quelqu’un la semaine prochaine.
— Un invité ?
— Eh bien oui ! Moi aussi, j’ai une vie sociale en dehors de la famille, mon garçon.
— Hum, hum, fit Brice. Et ne s’agirait-il pas d’une femme, par hasard ?
En dépit de ses quatre-vingts ans, Hugh McDonald était encore un fort bel homme et cela faisait des années qu’il était veuf.
— Pas d’impertinence, mon garçon, s’il te plaît !
— Ton invitée, c’est donc bel et bien une femme, s’exclama Brice, bluffé.
— Je ne te dirai rien, répliqua son grand-père d’un ton boudeur.
— Oh, je comprends, tu n’es pas du genre à divulguer des secrets d’alcôve ! fit Brice, moqueur, ravi que pour une fois les rôles fussent inversés.
— Prends garde à ce que tu dis, mon garçon ! répondit sévèrement son aïeul.
Déconcerté par cette « complication », Brice ne savait plus quoi faire ! Son beau projet allait-il s’écrouler ?
Et lui qui donnait des leçons à Sabina quant à sa relation avec sa mère, l’encourageant à entretenir un rapport plus adulte avec elle ! Or, voilà qu’il venait de se faire rabrouer par son grand-père comme lorsqu’il avait six ans !
— La réponse est non, alors ? fit-il, le cœur battant.
— Ai-je jamais dit une chose pareille ? s’exclama le vieil homme. Je tenais juste à te préciser que ma maison n’est pas un hôtel, encore moins une garçonnière où tu serais libre d’amener tes dernières conquêtes.
— Sabina n’est pas une conquête, objecta Brice sans avouer qu’il le déplorait vivement. On m’a passé commande de son portrait et j’ai accepté, c’est tout !
A ceci près que, depuis, il en avait perdu le sommeil et sa tranquillité d’esprit. Et il doutait de plus en plus que ce voyage contribuerait à les lui restituer.
— Sabina ? reprit alors son grand-père sur un ton intéressé. Il ne s’agit tout de même pas du top model ?
— Si, l’informa Brice. Tiens donc, je ne savais pas que le milieu de la mode t’intéressait.
Encore que sans être un expert ès mode, il était difficile d’ignorer qui était Sabina — sauf à vivre totalement coupé du monde. Son image s’étalait à la une de tous les journaux et magazines du pays depuis plusieurs années !
— Il y a beaucoup de choses que tu ignores à mon sujet, Brice, répliqua Hugh McDonald d’un ton sévère.
— Effectivement !
Apprendre que son grand-père recevait des hôtes du sexe opposé dans son château était un véritable scoop ! Il imaginait déjà la tête de ses cousins lorsqu’il leur annoncerait la nouvelle.
— Quand comptes-tu venir ? reprit le vieil homme.
— Je ne sais pas encore exactement. Je voulais d’abord vérifier que cela ne te posait pas problème avant d’arrêter des dates définitives.
— Viens quand tu veux, répondit Hugh d’un ton soudain plus léger.
Pourquoi ce revirement subit ? s’interrogea Brice. Parce qu’il s’agissait de Sabina ? Décidément, son grand-père était incorrigible !
— Je te rappelle cette semaine pour te confirmer ma venue le week-end prochain.
Dans une heure, il avait rendez-vous avec Richard et il serait enfin définitivement fixé sur la possibilité de réaliser ou non ce voyage avec Sabina. Evidemment, il aurait préféré n’avoir affaire qu’à cette dernière, mais en l’occurrence Latham était à la fois son commanditaire… et le fiancé de son modèle ! Difficile de faire abstraction de lui ! Il priait pour que Sabina soit présente durant ce curieux rendez-vous.
Cela faisait deux jours qu’elle était repartie brusquement de chez lui, deux longues journées durant lesquelles il avait été incapable de réfléchir. Néanmoins, il avait préféré laisser quarante-huit heures s’écouler afin que la colère de Sabina retombe.
Un vœu pieux ! pensa-t il avec dérision.
Toutes ses pensées étaient tournées uniquement vers la jeune femme ! Il se rappelait les instants uniques où il l’avait serrée dans ses bras, la douceur de ses lèvres, le goût exquis de sa bouche…
Jamais aucune femme ne l’avait obsédé à ce point, auparavant ! Et il fallait que ce fût une femme déjà prise !
— Entendu, répondit Hugh. Surtout, n’arrive pas à l’improviste, compris ?
— Rassure-toi, je ferai en sorte de ne pas te surprendre dans un moment délicat, répondit Brice en se demandant si cette invitée était réellement la petite amie de son grand-père.
Encore qu’à son âge, ce terme ne convenait pas forcément !
— Et j’espère bien que je n’aurai pas à rougir de ta conduite, précisa le vieil homme.
— Je te promets de bien me comporter, répondit Brice, soudain presque soucieux.
Cette mystérieuse invitée semblait très chère à son aïeul… et il ne savait pas trop qu’en penser. Il éprouvait quelque difficulté à imaginer Hugh avec une autre femme que sa grand-mère.
Allons, il n’avait nul droit d’être si égoïste ! N’était-il pas légitime que son grand-père aspire à un peu de compagnie, seul dans son grand château ?
Après cette conversation téléphonique, Brice resta un long moment songeur, jusqu’à ce qu’il s’aperçoive que, s’il ne filait pas tout de suite, il allait arriver en retard à son rendez-vous avec Richard Latham. Après tout, les affaires de cœur de son grand-père ne le regardaient nullement. Ce dernier était majeur depuis longtemps, veuf de surcroît, et avait parfaitement le droit de mener la vie qui lui convenait sans consulter ses petits-enfants.
D’ailleurs, lui-même n’avait-il pas conseillé à Sabina de ne pas juger sa mère ?
Une heure plus tard, alors qu’on l’introduisait dans le salon de Latham, Brice constata avec contrariété que ce dernier était seul pour le recevoir. Sabina devait certainement travailler, pensa-t il, attristé.
Richard Latham portait un costume noir et une chemise blanche, une tenue des plus classiques mais fort élégante, qui soulignait sa chevelure blond vénitien et lui prêtait beaucoup d’allure. Ses tempes grises rajoutaient à son charme, constata Brice à son corps défendant. Bref, il devait bien concéder que Latham portait beau, pour ses cinquante-cinq ans.
Mais curieusement, plus il le regardait, et plus il sentait grandir en lui l’aversion qu’il lui inspirait. Dès leur première rencontre, cet individu lui avait été antipathique. Et il le trouvait d’autant plus désagréable aujourd’hui qu’il vivait avec Sabina, passait chaque jour et chaque nuit en sa compagnie ! Cette dernière idée lui était particulièrement odieuse…
— Asseyez-vous, lui dit Latham sans grande chaleur dans la voix. Que puis-je vous offrir ? Du thé, du café ? A moins que vous ne préfériez de l’alcool ?
— Non, merci, répondit Brice, déjà désireux de repartir.
— Dans ce cas, que puis-je faire pour vous ? demanda Latham en plissant les yeux.
— N’inversez pas les rôles. C’est moi qui suis censé faire quelque chose pour vous. En l’occurrence, le portrait de Sabina.
— Effectivement, concéda Richard. Eh bien, acceptez-vous enfin ma commande ? Et si oui, comment comptez-vous procéder ?
Souhaitant en finir au plus vite, Brice déclara :
— Je compte peindre Sabina dans un cadre gothique ; en l’occurrence, en Ecosse.
A cet instant, on frappa à la porte et, sans attendre d’y être invitée, la domestique entra pour annoncer :
— Mlle Sabina est réveillée. Je vous préviens immédiatement, ainsi que vous me l’aviez demandé.
— Merci, madame Clark. Dites-lui que je monterai la voir dans cinq minutes.
— Sabina est-elle malade ? s’enquit Brice une fois qu’ils furent de nouveau seuls.
Devant l’inquiétude de Brice, un éclair brilla dans les yeux de Latham : irritation ? ressentiment ? Brice n’aurait su le dire… Néanmoins, le sourire de son interlocuteur masquait difficilement les profondeurs glacées de ses yeux bleu pâle.
Selon Richard, Sabina n’était pas malade, juste d’une nature délicate et nerveuse. Pour sa part, Brice ne partageait nullement cet avis. Certes, la jeune femme était surmenée, mais elle possédait en elle une force intérieure que lui déniait Richard, en faisant d’elle sa chose. Et puis, Brice avait expérimenté à ses propres dépens l’esprit d’indépendance qui animait Sabina !
Il se garda cependant de formuler son opinion à voix haute, se *******ant de dire, une fois que Latham eut exprimé son point de vue sur la santé de la jeune femme :
— Je suis navré qu’elle ne se sente pas bien.
— Pour en revenir à notre conversation, reprit Latham, Sabina m’a mis au courant de votre projet de voyage en Ecosse.
— Et alors ? fit Brice, subitement tendu.
— C’est une excellente idée, nous acceptons votre invitation.
Heureux d’apprendre par la bouche de Sabina que Latham serait en Australie, Brice avait alors déploré de façon fort hypocrite l’absence de son fiancé— bien qu’il n’ait jamais eu l’intention de l’inviter. Or, à présent, il se retrouvait pris à son propre piège !
Il sentit des sueurs froides lui couler dans le dos. La dernière chose qu’il souhaitait, c’était que Latham se joigne à eux !
— Je croyais avoir compris que vous ne seriez pas disponible, dit-il alors.
— J’ai modifié mes projets, répondit Latham d’un ton doucereux. Nous viendrons tous les deux avec vous, le week-end prochain.
Et dire qu’à son arrivée, Latham avait fait semblant d’ignorer le motif de sa visite. Décidément, cet homme était un redoutable adversaire ! Sous ses airs charmants et policés se cachait un individu dangereux, pensa Brice. David Latham avait eu raison de le mettre en garde contre son oncle.
A l’idée que Sabina allait épouser cet individu, il avait envie de hurler !
— Brice a très bon goût, murmura Chloe avec un sourire satisfait en ajustant la large bande d’étoffe qui sanglait la taille de Sabina.
Là-dessus, la créatrice recula de quelques pas pour admirer son œuvre…
Brice possédait évidemment d’immenses qualités, mais aux yeux de Sabina, cette robe couleur or dépourvue de bretelles n’était pas d’aussi « bon goût » que le disait Chloe. La coupe dévoilait entièrement ses épaules, le corsage était fort ajusté — bien trop selon elle —, d’autant que sa poitrine était mise en valeur par la large ceinture qui ceignait sa taille. Le bas de la robe retombait comme un voile doré et léger jusqu’à ses chevilles.
C’était là le costume qu’elle était censée revêtir pendant qu’il la peindrait dans le fameux donjon, en Ecosse…
Elle avait eu du mal à en croire ses oreilles lorsque Richard l’avait prévenue qu’ils se rendraient tous trois en Ecosse, le week-end prochain. Nul doute que, dès qu’elle l’avait informé des intentions de l’artiste, son fiancé avait modifié son agenda et reporté son voyage en Australie. Elle s’était retrouvée bien attrapée !
Et avait donc dû passer la veille du départ entre les mains de Chloe qui, en quelques heures, venait de réaliser la tenue souhaitée par Brice.
Depuis que cet artiste était entré dans sa vie, constata-t elle en soupirant, elle avait l’impression d’être ballottée par des forces qu’elle n’était pas en mesure de contrôler. Et elle trouvait la situation parfaitement déplaisante et des plus inconfortables.
— Dites-moi qu’elle vous plaît ! insista Chloe d’un air presque malheureux.
Impossible de ne pas complimenter la créatrice ! L’étoffe en fil d’or était du meilleur effet et c’était une création unique, elle devait l’admettre.
— C’est merveilleux, dit-elle dans un sourire rassurant.
— J’espère que Brice va aimer, déclara Chloe avec inquiétude.
Sabina se garda du commentaire qui lui brûlait les lèvres : elle se fichait comme d’une guigne de ce qu’il pouvait bien penser !
— Il va adorer, déclara Brice d’une voix rauque en entrant dans la pièce.
Sabina se retourna brusquement et l’admiration qu’elle lut dans son regard la fit pâlir. Allons, c’était juste la robe qu’il admirait. Pas elle ! se dit-elle pour se rassurer sans trop y croire.
— Ouf, je suis soulagée qu’elle te plaise, dit Chloe.
— C’est parfait, ajouta Brice en s’approchant des deux femmes.
Il portait un jean et un T-shirt noir moulant qui soulignait la musculature de ses bras. Le noir lui allait à ravir, pensa Sabina.
— Tiens, tu es allé chez le coiffeur, constata Chloe.
Et sa nouvelle coupe le rendait, hélas, encore plus séduisant ! se dit immédiatement Sabina.
— Les cheveux longs, c’est un peu passé de mode, non ? fit Brice.
— Moi, je trouvais que ça t’allait très bien, renchérit sa cousine. Bon, je vais préparer du café, je reviens.
Oh non ! Elle qui voulait éviter tout tête-à-tête avant le départ… Impossible pourtant de protester ou de s’enfuir dans cette tenue ! Fort gênée, elle sentit le regard de Brice se poser sur elle.
— Je ne sais comment interpréter la remarque de Chloe sur ma coupe de cheveux, commença-t il.
Fausse modestie ! Cheveux courts ou longs, il était parfaitement conscient de son charme !
— Excusez-moi, dit-elle en fuyant son regard, je vais remettre mes vêtements.
— Mais cette robe est à vous ! observa-t il, amusé. Son prix est compris dans la facture que paiera Latham.
— Bien sûr, mais…
Sans terminer sa phrase, elle voulut regagner la cabine où elle s’était changée un peu plus tôt. Pourquoi l’habituée des podiums qu’elle était devint-elle brusquement si gauche ? Toujours est-il qu’elle s’empêtra les pieds dans les voiles de sa robe et que sans le bras secourable de Brice, elle serait tout simplement tombée par terre !
— Tout va bien ? demanda-t il, inquiet. Etes-vous réellement remise ?
Elle fronça les sourcils… avant de comprendre son allusion. Elle était alitée le jour de sa visite !
— Oui, c’était une simple migraine.
— Vraiment ? fit-il sans la relâcher. A en croire Latham, c’était davantage qu’une migraine.
— Vous aurez mal interprété ses propos, répondit-elle avec désinvolture.
Ce jour-là, elle avait reçu une autre lettre anonyme qui l’avait bouleversée au point qu’elle avait pris un anxiolytique et s’était mise au lit ! Mais elle s’abstint de l’en informer.
— Non, je ne crois pas, insista-t il en la scrutant de ses prunelles perçantes.
— Donc, nous partons demain pour l’Ecosse, dit-elle tout en se dégageant de son étreinte.
— Effectivement… Mais dites-moi, Latham n’a-t il donc aucune confiance en vous pour renoncer à son voyage en Australie afin de nous accompagner ?
— Ce n’est pas de moi mais de vous dont il se méfie, rétorqua-t elle, ironique.
— Peut-être n’a-t il pas tort, finalement, approuva-t il en lui décochant un sourire diabolique.
Pourquoi Chloe mettait-elle si longtemps à revenir ? se demanda soudain Sabina, fort mal à l’aise.
— Avez-vous téléphoné à votre mère ? l’entendit-elle poursuivre.
— Ecoutez, ma mère et Richard…
Oh, et puis zut ! Ses affaires privées ne le regardaient nullement, elle n’avait absolument pas à se justifier.
— Votre mère désapprouve le choix de votre fiancé, n’est-ce pas ? Elle le trouve trop âgé !
— Pour commencer, Richard n’est pas âgé ! Et ensuite…
— Remarquez, je la comprends, enchaîna-t il sans l’écouter. Il doit être curieux d’avoir juste dix ans de plus que son gendre. Pour ma part, je suis impatient de rencontrer Leonore.
— Ne comptez pas là-dessus ! le prévint-elle sèchement.
— Dites-moi, Sabina, demanda-t il soudain en croisant les bras, à part vous, quelqu’un apprécie-t il réellement votre fiancé ?
— Brice ! s’écria-t elle, indignée. Vous allez trop loin !
— Pas aussi loin que je le voudrais, malheureusement, l’interrompit-il alors en dardant sur elle de grands yeux mélancoliques.
Hélas, elle savait qu’il était sincère. Et elle redoutait les surprises que le week-end allait leur réserver !
D’abord étonnée que Richard ait accepté le voyage en Ecosse, elle avait finalement pensé qu’en sa compagnie, Brice ne tenterait pas de l’importuner, et qu’un week-end était vite passé.
A bien y réfléchir cependant, et étant donné l’aversion manifeste que ce dernier ressentait pour son fiancé, la présence de Richard n’allait-elle pas rendre la situation ingérable ?
Vivement que ce fichu portrait, source de tous ses malheurs, soit terminé et que Brice sorte de sa vie ! se dit-elle encore. Et où diable était donc passée Chloe ?
— A propos de ce week-end…, commença Brice.
— Oui ?
— Mon grand-père a quatre-vingts ans. Sans vouloir moi-même porter de jugement moral sur votre concubinage, je doute que… enfin, vous me comprenez.
— Non, pas du tout ! affirma-t elle, peu désireuse de lui faciliter la tâche.
— Eh bien, la vie que vous menez à Londres avec Latham ne regarde que vous. En revanche, chez mon grand-père…
— Cessez d’être sibyllin, et dites franchement ce que vous avez sur le cœur !
— Il est un peu vieux jeu et je doute qu’il apprécie qu’un couple non marié partage la même chambre sous son propre toit ! Par conséquent, Latham et vous devrez dormir dans des chambres séparées.
Ah, c’était donc ça !
— Richard et moi n’y verrons aucun inconvénient, affirma-t elle alors.
— Je me moque de ce que pense Richard. C’est vous que je voulais prévenir.
— Comme c’est aimable de votre part, répliqua-t elle d’un ton acerbe.
— Une dernière chose, Sabina… C’est un très vieux château… et le parquet grince, si vous voyez ce que je veux dire.
Cette allusion directe la fit brusquement rougir. Il la mettait en garde contre d’éventuelles allées et venues nocturnes ! Prenant une large inspiration, elle répondit :
— Je suis certaine que je pourrai passer deux nuits seule. Enfin, Brice, n’ayez crainte, je saurai me conduire décemment !
Là-dessus, bouillonnant de colère, elle courut s’enfermer dans la cabine.
Comment osait-il formuler de telles insinuations alors qu’il ignorait tout de son style de vie ? Il ne savait pas qu’à Mayfair, Richard et elle occupaient des chambres séparées.