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Chapitre 17
Mehmet suivait de loin Ben après être sorti de l’avion. Il avait pris son billet d’avion à la dernière minute. Il était
******* de lui. La filature était son point fort et il était près du but.
Il aperçut Ben qui se séparait du groupe. Il avait renvoyé les hommes, qui l’avaient accompagné, en France. Il était
inutile d’être plusieurs pour le moment. Etre trop nombreux aurait pu mettre la puce à l’oreille du frère de Christelle.
Ben se dirigea vers les toilettes après avoir récupéré sa valise. Mehmet l’attendait patiemment à l’extérieur puisqu’il
n’y avait qu’une sortie.
Mehmet avait envie de fumer. Les minutes passaient sans que Ben ne sorte. Mais que pouvait-il bien faire ?
Il hésitait à rentrer de peur de se faire remarquer. Mais au bout d’une demi-heure, il décida d’y aller.
La valise était devant la porte. Elle était grande ouverte. Il y avait un jeans, une chemise noire et une paire de
chaussure à l’intérieure. Il se souvenait que Ben était habillé ainsi.
Il regarda par précaution en dessous des portes des toilettes mais il ne vit aucune personne.
Ben s’était évanoui dans la nature.
Mehmet se rappela avoir vu un homme moustachu sortir de là. Il portait une chemise hawaïenne bleue, un bermuda
jaune ainsi que des tongs et un chapeau ridicule en paille. En y songeant à présent, il ne l’avait pas vu rentrer.
Il tapa rageusement sur la valise. Comment allait-il expliquer cela à Lolé ?
♦♦
Ce fut Christelle qui ouvrit la porte lorsque Ben sonna chez Marks. Il était tout sourire après s’être joué de l’homme
qui le suivait. Christelle ne parut pas le reconnaître. Une simple moustache ainsi qu’un chapeau de paille lui changeait la
physionomie de son visage. De plus Christelle ne l’avait jamais vu vêtu de la sorte. C’était Rebecca qui lui avait acheté ces
vêtements la veille.
- Salut soeurette !
- Ben ?
- Tu me laisses entrer ?
Christelle s’effaça. Ben pénétra, referma la porte derrière lui et embrassa sa soeur sur la joue.
- Mais où sont tes valises et c’est quoi ce déguisement ?
- Je vais tout t’expliquer depuis le début mais je veux bien que tu m’offres un café.
- Bien sûr.
Christelle prépara un cappuccino avec la super cafetière d’Isabelle. Elle penserait à en acheter une quand elle
retournerait chez elle car Ben avait un faible pour ce genre de café.
Lorsque Christelle posa sa grosse tasse devant Ben, il commença à tout lui raconter.
Ben qui ne se doutait pas au début d’être suivi par la mafia avait reçu un message écrit. Celui-ci lui avait été remis par
le réceptionniste de l’hôtel Giorno.
Il sortit de son portefeuille une feuille qu’il tendit à Christelle.
A l’intention de Ben Gordon,
Vous êtes suivi et vous risquez d’indiquer l’endroit où se cache votre soeur. L’homme
qui vous suit prendra le même avion que vous. Il mesure environ 1m80 et a le crâne rasé.
Trouver un subterfuge quand vous descendrez de l’avion.
Votre ange gardien
Ben avait interrogé le réceptionniste. Celui-ci n’avait fait que prendre note lorsqu’il avait reçu un appel téléphonique.
L’homme lui avait dit qu’il faisait parti d’interpole. C’était tout ce qu’il savait.
Ben avait remarqué dans la journée qu’effectivement un homme semblait le suivre de temps à autre. Pour plus de
précaution, il avait demandé à Rebecca, qu’il avait mit dans la confidence, de lui faire des emplettes une fois seule. Elle lui
avait donc acheté toute une panoplie de déguisement.
Il se ferait certainement encore plus remarqué mais au moins il ne ressemblerait pas ce qu’il était tous les jours.
A l’aéroport, Rebecca avait prit les deux valises de Ben contenant ses affaires. Ben avait saisi la valise rouge qui était
plus voyante et qui contenait son déguisement. Il s’était ensuite séparé de la famille Luciano et s’était dirigé vers les
toilettes afin de se changer.
L’homme attendait non loin de là et n’avait pas bougé lorsqu’il était sorti. Il avait prit par la suite un taxi tout en
surveillant si l’homme n’apparaissait pas derrière lui.
Sous les ordres de Christelle, il avait indiqué au chauffeur l’adresse de Marks.
- Je te savais très futé Ben. De mon côté, j’attends toujours des nouvelles de Byron et de Greg. Il faudra bien qu’un
jour cela cesse.
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- C’est clair… Christelle, il faudra que tu penses à t’acheter une robe de demoiselle d’honneur. Il y aura un mariage
dans deux semaines.
- Pour qui vais-je être la demoiselle d’honneur ?
- Rebecca.
- Elle va se marier ?
- Correction... nous allons nous marier.
- Vous êtes très jeune.
Ben sourit à cette remarque.
- C’est ce que Tony à dit. Mais j’ai dix-huit ans…
Christelle savait pourtant que Ben, bien que jeune, savait prendre des décisions de haute importance. Il avait eu son
diplôme d’ingénieur très jeune car c’était un garçon surdoué. Toutes ses réflexions étaient celles d’une personne d’âge mûr.
- Je sais…mais tu ne peux pas…
- Pourquoi ?
- Parce qu’Isabelle a perdu son bébé cette semaine.
♦♦
Isabelle était restée dans le coma une bien longue journée. Elle n’avait repris connaissance que dans le courant de
l’après-midi. Christelle et Marks avaient veillé sur Isabelle tout au long de cette période et avaient dû dormir qu’une heure
environ chacun. Tous les deux n’arrêtaient pas de lui parler. Puis elle avait bougé la main. La première parole qu’elle avait
prononcée était :
- Où est mon bébé ?
Ni Marks ni Christelle n’avaient osé lui répondre.
- Réponds-moi Marks !
- Je vais vous laissez seul, avait dit Christelle.
- Non, reste s’il te plaît, avait insisté Marks.
Après une longue hésitation, Marks avait ajouté :
- On a perdu le bébé.
Isabelle s’était fendue en larmes. Marks et Christelle avait essayé de la réconforter.
- Je suis désolée Marks. Je sais que... que tu voulais ce bébé plus que tout.
- Tu dis n’importe quoi. Tu es en vie et c’est tout ce qui compte. Tu es toute ma vie. Si je t’avais perdue, je n’oserai
pas imaginer ma vie sans toi. Je t’aime.
- Moi aussi, je t’aime.
Christelle, pendant ce temps-là, s’était éclipsée et était revenue une demi-heure plus tard pour les retrouver dans le
même lit entrelacés et endormis. Ne pouvant les quitter sans les avoir salué, elle fit un tour dans l’hôpital et s’était arrêté à
la nursery. Tous ces petits nouveaux nés, si mignons la fit rêver. Une image s’était interposée dans sa tête. Celle d’avoir un
enfant d’Anthony. Ce fut la seconde fois qu’elle y pensait. Cet homme lui faisait beaucoup d’effet. Elle avait chassé cette
image d’un coup de main. Tous les jours, elle n’avait cessé de penser à lui.
♦♦
- Quoi ! La pauvre. Je ne sais pas quoi dire. Comment va Isabelle ? Où est-elle en fait ?
Ben était sous le choc. Isabelle était comme une seconde soeur pour lui.
- Ca va mieux et elle se repose. Tu comprends maintenant pourquoi il faut changer de date.
- Ok. J’irai parler à Rebecca pour annuler.
- Pas Question ! Répliqua Marks qui pénétra dans la cuisine. Je n’ai pas pu m’empêcher d’écouter et j’ai bien fait.
Tout se déroulera comme prévu. Mes félicitations ! Dit Marks en lui serrant la main.
- Merci, mais je peux le reculer, ce n’est pas…
- Non, ce sera parfait et ça changera les idées à Isabelle.
- C’est toi qui vois.
- C’est vu. Et Isabelle aura également besoin d’une robe. Cela lui ferait du bien de sortir.
Christelle hocha affirmativement de la tête. Marks avait raison.
♦♦
La journée tant attendue par Ben et Rebecca commença par une belle matinée ensoleillée sans nuage.
A une heure, le piano jouait les premières notes de la marche nuptiale. Ben, très beau dans son costume noir, attendait
Rebecca qui arrivait au bras de son frère.
Elle était si belle dans cette robe de mariée. C’était une robe de princesse digne des films hollywoodiens avec une
longue traîne d’environ trois mètres. La robe blanche était sertie de diamants. C’était un cadeau d’Anthony.
Au lieu de s’asseoir sur une chaise, Anthony vint se placer à droite comme témoin.
Qu’il était beau. Et ce sourire si craquant. Ces baisers, toutes leurs danses où ils étaient enlacés, leurs discussions,
leurs parties d’échecs ainsi que leurs disputes suivies de leurs réconciliations, revinrent en mémoire à Christelle. Mais la
dernière avait tout tranché. A la réflexion, depuis qu’il avait annoncé son mariage avec Kate, tout était fini.
- Je vous déclare mari et femme. Vous pouvez embrasser la mariée, intima le prête.
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Un long baisé unit leurs voeux.
A la sortie de l’église et après le traditionnel jeté de riz sur les mariés, tout le monde se dirigeait vers leur voiture. Ils
devaient tous se rendre chez Anthony pour la réception.
Et Anthony qui s’approchait de plus en plus d’elle. Elle aperçut dans la rue deux jeunes adolescents qui parlaient
bruyamment.
- Il vient cet indice, oui ou non ? Questionna le jeune adolescent à la fille.
- Son frère s’appelle Galaad.
- Ravenscar ? Lui cria-t-il au visage.
- Oui, répondit-elle d’une toute petite voix.
- Lord Lucifer en personne ! Mais tu es folle ! Mais tu es folle ! Qu’a-t-il dit ? Qu’as-tu fais ? Que comptes-tu faire
pour demain ? Et moi, que vais-je dire à Galaad s’il me pose des questions ? Et si ce diable de professeur n’a pas apprécié,
tout va me retomber sur le nez. Ah, ma soeur est folle ! Elle s’en est prise à Ravenscar, au secours !
Ecoutant ces adolescents, Christelle ne put que penser à sa propre jeunesse si vite passée mais cependant pas regrettée.
Un passant l’arrêta pour lui demander l’heure.
- Il est cinq...
- Vous allez me suivre sans commentaire, dit-il à voix basse.
L’homme brun qui était légèrement plus grand qu’elle la regardait d’un air menaçant. Cet homme aurait pu être beau
mais son nez aplatit lui enlevait tout son charme.
- Vous croyez ça ! Répliqua-t-elle en essayant de le contourner mais il s’interposa.
- Si vous ne me suivez pas, ces deux jeunes adolescents seront mort, précisa-t-il en lui montrant une arme sous sa
veste en cuir.
- Mais qui êtes-vous ?
- Ne posez pas de question.
- Vous êtes un des sbires de Montana, c’est ça !
- Pas de question, ordonna-t-il. Où...
- Christelle ! Entendit-elle crier derrière elle.
- En route, ne vous retournez pas.
Ils s’engagèrent dans une ruelle sombre où les attendait un camion. Un coup sec, la fit se retourner. La vision
d’Anthony étalé par terre la fit pâlir.
- Que fait-on de lui Carl ? Demanda un autre homme.
C’était certainement l’homme qui avait suivi Ben car il avait le crâne rasé.
- Met-le dans le camion, il peut nous porter préjudice et on verra avec le patron.
- Laissez-le, s’il vous plaît ! Il ne sait rien, supplia-t-elle.
- J’ai dit de te taire ou tu te prends la prochaine fois une baffe ! Et monte dans ce foutu camion !
Toute tremblante, elle obéit aux ordres de ce fameux Carl. Le deuxième homme déposa Anthony à côté d’elle. Les
deux portières se refermèrent sur eux dans un bruit sec. Christelle mit la tête d’Anthony sur ses genoux.
Qu’allait-il leur arriver ? Elle ne se pardonnerait jamais s’il arrivait quelque chose à Anthony. Elle n’aurait pas dû
suivre ces voyous. Ce Carl aurait-il vraiment tiré sur les adolescents ? Elle n’avait pas voulu prendre de risque. Où allaientils
? Allait-on les tuer comme Christian ? Tout était à présent de sa faute.
Elle passa sa main sur les cheveux noirs d’Anthony et sentit sur sa main du liquide chaud. Ce liquide était du sang.
Etait-il mort ? Elle tâta le pouls dont elle découvrit qu’il battait régulièrement. Ouf ! Il était vivant.
Qu’allait penser Ben et Rebecca en ne les voyant pas à la réception ? Est-ce qu’ils se douteraient qu’on les avait
kidnappés ? Donneraient-ils à temps l’alerte ? Mais comment allait-on les retrouver ? Personne n’avait été témoin de leur
enlèvement.
Ils roulèrent une bonne heure environ et Anthony n’avait pas repris connaissance. Le bruit des voitures environnantes
s’était estompé. Tout était silencieux. Ils avaient dû quitter la ville.
Est-ce que ces hommes allaient les abattre dans un bois ? Cela serait une mort affreuse et leurs familles respectives se
feraient du sang d’encre. Et Ben qui avait déjà perdu ses parents. Il ne serait à présent plus seul maintenant qu’il était
marié. Rebecca serait prendre soin de lui.
Le camion s’arrêta enfin et les portières s’ouvrirent à grande volée. L’homme au crâne rasé prit Anthony comme un
vulgaire sac de pomme de terre et Carl l’attrapa par le bras sans égards.
Christelle observa les alentours. Ils se trouvaient loin de tout. Il n’y avait qu’une grande usine désinfectée autour d’un
pré.
Après un dédale de labyrinthe de couloirs, ils arrivèrent devant une porte blindée. Carl la poussa sans ménagement à
l’intérieure de la pièce et Anthony fut posé par terre. Carl referma la porte à double tour sans un regard et aucune parole.
Que leur réservaient-ils ?
La pièce était nue. Elle ne comportait aucun meuble mise à par un ancien coffre fort ouvert en grand. Le mur, jadis
blanc, était devenu gris et la peinture s’écaillait dans certains coins.
Christelle s’agenouilla près d’Anthony et caressa sa joue. Il bougea enfin et gémit.
- Christelle ?
- Je suis là, lui dit-elle.
- J’ai de ces maux de tête…
Anthony se releva à demi et se dirigea vers le mur où il se laissa glisser dos contre celui-ci.
- C’est normal, vous avez reçu un coup.
- Où sommes-nous ?
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- Loin de la ville. On nous a kidnappés.
- Par qui ?
- Les hommes de Montana.
- Pourquoi ?
- Vous vous souvenez de notre séjour en France.
N’obtenant aucune réponse, elle ajouta :
- Et bien, je pense que se sont les hommes qui nous ont pourchassés Christian et moi... et Christian est mort... sa
voiture a explosé.
- Comment savez-vous que se sont les hommes de Montana ?
- J’ai reçu deux lettres de Greg qui m’en parlait.
- Je vois. Et pourquoi en avaient-ils après vous ?
- Je ne vous ai pas dit la vérité. Christian avait assisté à un déchargement de drogue et à un meurtre.
- Pourquoi ne m’avez-vous rien dit ?
- J’avais peur...
- De quoi ?
- De vous.
- Pourquoi ?
- Pendant notre séjour en France, j’ai surpris une conversation téléphonique sans le vouloir lorsque nous étions à
l’hôtel Concorde.
- Et c’était à quel sujet cette conversation ?
- Vous avez dit que la cargaison était arrivée et que vous étiez à la recherche d’une personne.
- Et alors ?
- Au moment où vous avez passé le bonjour à la famille, j’ai pensé à la mafia.
- Pourquoi à la mafia ? Non laisse moi deviner... à cause de mon nom.
- Exactement, ce n’est pas ma faute si Lucky Luciano faisait partie de la mafia. Et le lendemain, comme par hasard, je
rencontre Christian qui me dit avoir assisté à un déchargement d’une cargaison de drogue et à un meurtre la veille. Sur le
moment je n’ai pas fait le rapport. C’est bien après.
- Il s’agissait d’une cargaison de voitures pour un salon très privé de l’automobile.
- J’aurai dû m’en douter. Me pardonnerez-vous ?
- Je ne sais pas...
- Comment va-t-on faire pour sortir ?
Anthony posa les coudes sur ses genoux repliés puis prit sa tête entre ses mains. Il paraissait méditer. Christelle prit
place à côté de lui.
Christelle sentit le trouble l’envahir et frissonna. Comment avaient-ils fait pour la retrouver ? Etait-ce à cause de la
télévision ?
Cette journée qui s’était bien déroulée, se finissait mal. Elle allait s’en doute perdre le seul homme qu’elle n’avait
jamais aimé qui cependant appartenait à une autre. Christelle se *******a de soupirer. Jamais elle n’avait eu de chance.
La porte s’ouvrit.
- Je vois que tu es réveillé, lança Carl.
Anthony ne broncha pas. Il ne pouvait rien faire contre un homme armé.
Carl envoya dans leur direction un sac.
- Voilà votre repas. Peut-être sera-t-il le dernier. Si cela n’avait tenu qu’à moi, je vous aurai déjà tué. Mais on doit
attendre la venue de Lolé demain. Il a un compte à régler personnellement avec vous.
Carl, sur ces dernières paroles pas très rassurantes, tourna les talons et claqua la porte. Christelle sursauta.
Anthony passa un bras protecteur autour de ses épaules et l’attira vers lui. Christelle posa sa tête sur sa puissante
poitrine. Sa chaleur lui donna un peu de réconfort.
- C’est ma faute si je vous ai mis dans ce pétrin…
- Chuuuut… Ne dis pas de bêtise, la coupa-t-il en reprenant leur tutoiement. Allé, il faut manger à présent…
- Mais…
- Nous devons reprendre des forces surtout que nous n’avons pas mangé depuis ce matin. Et si nous voulons trouver
une solution, mieux vaux avoir l’estomac plein.
Anthony se détacha d’elle et ouvrit le sac qui était près de ses pieds. Il sortit les deux sandwiches au poulet et les deux
boîtes de frites. Il déposa entre eux les deux bouteilles d’eau.
Ils se restaurèrent dans le silence car chacun était dans ses pensées.
Christelle admirait Anthony. Il avait un sang froid inébranlable.
- Christelle ?
La jeune femme releva la tête en entendant la voix doucereuse d’Anthony.
- Il faut que nous parlions.
Christelle se souvenait qu’il lui avait demandée cela lorsqu’ils étaient au Brésil. Mais cette conversation n’avait jamais
eu lieu.
- Pourquoi t’es-tu enfuie lorsque je t’ai demandé de m’épouser ? Nous avons vécu tant de chose ensemble. J’ai failli te
perdre à Paris à cause d’eux. Je voulais tant vivre avec toi cette passion qui me semblait réciproque. Un simple « non » et
des explications auraient été plus justes.
- Juste ? C’est toi qui me parles de justice ?
Anthony s’essuya les mains pleines de sauce.
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- Que veux-tu dire ? Demanda-t-il en la regardant droit dans les yeux.
- Je vais te rafraîchir la mémoire. Tu avais demandé à une autre de t’épouser.
- A une autre ?
- Oui, Kate Wentworth !
- Mais…
- Arrête de mentir. J’ai vu la photo et je cite le reporter : le beau Anthony Luciano a fait sa demande en mariage pour
la deuxième fois à la sublime Kate Wentworth. Souhaitons-leur tout le bonheur du monde, récita-t-elle d’un ton
sarcastique.
Anthony fronça les sourcils puis éclata de rire.
- Ecoute-moi… quand je lui ai demandé de m’épouser c’était une mascarade.
- C’est-à-dire ? Questionna-t-elle soupçonneuse.
- Kate voulait reconquérir son amour. Elle m’avait quitté pour lui, il y’a quelques années. Puis les années ont passé et
l’amour qu’il lui portait semblait être un lointain souvenir. Elle voulait le faire réagir et m’a demandé de l’aide. Kate n’est
pas mauvaise et je ne lui en ai pas voulu d’être parti pour un autre. C’est même grâce à elle que je suis devenu ce que je
suis… et tu connais pourtant les magasines people… tout paraît vrai mais pourtant tout est faux. Kate voulait pour une fois
se jouer des journalistes peu scrupuleux tout en lui servant sa cause. Ceci a finalement marché et il a fini par lui demander
sa main. Je ne pensais pas une seconde que tu lisais ce genre de presse à scandale.
Christelle doutait. Se moquait-il encore une fois d’elle ? Il disait peut-être la vérité car il n’avait jamais vu Kate avec
lui.
- Et toi, tu ne m’avais pas dit la vraie raison de ta participation à la formule 1.
- J’avais promis à mon père de reprendre sa succession. Et je l’ai tenu... et toi ! Tu ne m’as pas dit la raison pour
laquelle tu n’acceptais aucune fille dans ton écurie ?
- Je n’ai pas voulu t’engager car je pensai te perdre, c’est la première raison. Et la deuxième est que mon père, un jour
où il avait hésité entre deux pilotes m’a demandé de choisir. Parmi ces deux pilotes, il y avait une femme. Et je l’ai choisi.
Puis à la sixième épreuve, elle a eu un accident et elle est ... morte.
Christelle se rapprocha de lui et le serra contre elle.
- Ce n’est pas ta faute. Et tu as bien vu que les femmes savaient aussi bien conduire que les hommes.
- Je le sais mais...
- Chut ! Embrasse-moi.
Ne le voyant pas faire le premier pas, elle l’embrassa.
Cela faisait des mois qu’il ne l’avait pas embrasée avec une infinie douceur.
- Que c’est mignon les deux tourtereaux. Profitez-en. Toi, viens avec moi.
- Laissez-la tranquille ! Prenez-moi à sa place, s’interposa Anthony en se levant.
- On veut jouer le héro.
Carl prit Anthony par le col et sortit un revolver.
- Quand je dis une chose, j’aime pas me répéter. Compris ?
Les yeux d’Anthony lançaient des éclairs. Ses poings se refermèrent sous la colère. L’envie de le frapper lui prenait.
Ce n’était pas le moment de faire n’importe quoi. Carl était le plus fort… pour l’instant.
- Compris, répondit-il contraint et forcé.
Pendant un long moment qui sembla s’éterniser, Carl rangea son arme.
- Je l’espère pour toi… Tu te dépêches ou quoi ! Aboya-t-il à l’adresse de Christelle.
Sur ceux, Carl poussa Christelle vers la sortie et referma la porte. Qu’allait-il faire ? Son coeur avait battu la chamade
lorsque le ravisseur avait pointé son arme sur la tempe d’Anthony.
- J’arrive. Du calme.
♦♦
La tête sur les genoux d’Anthony, c’est ainsi que Christelle se réveilla le lendemain matin. Anthony était en train de
lui caresser les cheveux.
Christelle se rappela de suite de leur captivité.
La veille, elle avait passé une heure en tête-à-tête avec Carl. Il l’avait interrogé pour savoir ce qu’elle savait
réellement. Il avait feint de vouloir la frapper pour lui soutirer elle ne savait quelles informations.
Christelle avait essayé de l’acheter avec beaucoup d’argent sans y réussir. Elle avait promis de ne jamais en parler à
quiconque. Mais Carl était resté intraitable même s’il ne paraissait pas insensible à son charme. Il effleurait de temps à
autre ses épaules nues ou un de ses bras.
- Bonjour toi, murmura Christelle.
- Bonjour toi. Ce n’est pas le moment ni l’endroit mais je voudrais que tu saches que je t’aime.
- Moi aussi, depuis que je t’ai rencontré.
- Tu dis depuis que tu m’as rencontré ?
- Oui.
- Tu n’as pas eu des sentiments pour Bobby !
- C’est un gentil garçon c’est tout. Et puis, il est amoureux de Cindy.
- Admettons que cela soit vrai, alors, à qui était dédié ce poème ? Demanda-t-il en sortant de son portefeuille un papier
froissé et en le lui tendant.
Christelle reconnut la feuille et se mit à rire.
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- Tu ne sais pas à qui ? Lis les premières lettres de chaque vers, de haut en bas... tu ne trouves pas que cela forme le
nom d’Anthony Luciano.
Anthony identifia les lettres.
- Tous ces malentendus pour rien, dit-il en l’enlaçant.
- Tu m’aimais même en croyant que j’aimais un autre homme ?
- Oui. Peut-être parce que mon coeur ne voulait pas croire que tu l’étais.
- Mon pauvre chéri…
Anthony la prit dans ses bras et la serra tout contre lui. Il avait peur de la perdre. Il n’avait jamais une personne
comme il aimait Christelle.
Un bruit de serrure les fit se séparer et Carl apparut.
- Voici votre petit déjeuner, dit-il en posant un plateau près de la porte puis en s’en allant tout aussi vite.
- C’est vrai qu’il a l’air d’avoir le béguin pour toi, affirma Anthony après avoir vu la manière dont Carl la regardait.
Sale petite garce ! Hier, t’as dû passer un bon moment avec ce type ! Cria-t-il hors de lui.
- Mais tu es fou !
- Oui, je suis fou !
Et Anthony lui donna la plus grosse gifle qu’il ne lui ai jamais donné de faire dans sa vie. Christelle perdit l’équilibre
et tomba par terre. Un filet de sang coula de la lèvre de Christelle et ses yeux se mirent soudain à pleurer.
- Pardonne-moi... s’excusa-t-il en voulant la prendre dans ses bras.
- Ne me touche pas ! Hurla-t-elle.